L’alimentation, un sujet au cœur des préoccupations de cantines et cafés culturels associatifs

Agir dans et pour une économie plurielle

Mais tout d’abord, qu’est-ce qu’un café/cantine culturel associatif ? Pour en savoir plus, rendez-vous sur cette page de définition. Deux initiatives sont documentées ci-dessous, sous l’angle de l’alimentation : Le Magasin des possibles (71) et La Maison Garbay (40).

Le Magasin des possibles réfléchit à produire ses légumes*

L’association Les Martselots a créé en 2019 un café associatif-épicerie à Semur (71), qui propose des produits « locaux, de saison, sains, en vrac à des prix démocratiques » avec l’objectif « de participer à la transition écologique et de valoriser la biodiversité et le vivant ».

Emma Chardon, des idées plein la tête, est installée dans le Brionnais (71) depuis une dizaine d’années, pour, initialement, faire du maraîchage. Lorsqu’en 2018, la seule épicerie de Semur-en-Brionnais ferme, elle propose d’y créer « une bulle de convivialité et de lien social où lon peut bien se nourrir, quel que soit ses moyens ». Le local est particulièrement approprié : donnant sur la rue principale du petit village médiéval, il est constitué de plusieurs espaces ouverts, idéal pour séparer tout en mettant en liens une épicerie, un espace bar et restauration et un coin lecture. À l’arrière, l’extérieur sera plus tard réaménagé en terrasse verdoyante et lumineuse. Avec l’accord de la commune, l’association Les Martselots – les marchands en patois – s’installe dans le local municipal en échange d’un petit loyer. Le projet associatif précisé et quelques travaux plus tard, le café-épicerie associatif Le Magasin des possibles, ouvre ses portes le 21 juillet 2019.

Le Magasin des possibles, un lieu de valeur(s)

Emma Chardon, aujourd’hui coordinatrice salariée, le souligne : « Nous navions plus d’endroits ni de moments pour discuter ». Le Magasin des possibles veut être un créateur de liens entre les habitant∙es du village et alentours. Pour elle, le lieu ne peut-être qu’associatif : « les liens priment sur les biens ». L’association fait peu de marge (30% maximum) pour proposer des prix accessibles et une juste rémunération des producteur·rices. On trouve des produits locaux et du vrac : « On travaille avec les Jardins de Cocagne à Roanne, la Ferme des Horizons à Sail-les-Bains pour les légumes, et plein dautres ». Cependant, il manque cruellement de maraîcher∙ères, alors, le Magasin des possibles travaille sur un projet de production de ses propres légumes, avec potentiellement un nouvel emploi. Pour les denrées plus exotiques, le café-épicerie a recourt au commerce équitable, le café est zapatiste par exemple.

Informer, débattre, s’ajuster

En plus de proposer, dans la convivialité, des manières de se nourrir plus justes et plus saines, Le Magasin des possibles organise des soirées-débats et des ateliers comme « créer son jardin forêt » ou encore « créer son jardin comestible ». Emma insiste aussi sur l’importance d’informer : « Cest essentiel, car on constate que des personnes nosent pas rentrer, considérant que ce nest pas pour elles, qu’elles n’ont pas les moyens, mais ce n’est parce que c’est bio et en vrac que c’est cher ! ». Pour tenter de répondre aux idées reçues sur l’alimentation, Le Magasin des possibles coopère avec Radio-Cactus, qui se situe dans la même rue. Cependant, les produits peuvent rester trop chers pour toutes celles et ceux qui vivent la pauvreté. C’est pourquoi l’association compte bien s’ajuster et réfléchit à une « accessibilité sociale alimentaire » construite avec des services sociaux.

Contact : Emma Chardon Coordinatrice / lemagasindespossibles@posteo.net

* Article paru dans Transrural initiatives, numéro 495, 2023

La Maison Garbay : Prendre en compte, à son échelle, les enjeux de l’alimentation

La Maison Garbay, portée par l’association Ecoloris, est un lieu de rencontres et d’échanges avec un café, un espace restauration et une épicerie majoritairement bio et locale « à des prix très attractifs ». 

A Luglon, un village de 450 habitants des Landes, entre deux zones plus touristiques – la côte et la Chalosse – il n’y avait plus ni café (depuis 2 ans), ni épicerie (depuis 8 ans). Les seuls lieux d’échanges étaient alors la salle des fêtes et la maison de la chasse. En 2016, des habitant·es de Luglon et des alentours ouvrent La Maison Garbay. Garbay, c’est le nom d’un grand oncle du particulier, M. Marchat, qui a mis le lieu à disposition, tout en prenant en charge les travaux, en échange d’une contribution mensuelle modique. M. Marchat n’est plus ; la maison, elle, continue d’accueillir un café, un espace de restauration ponctuelle, une épicerie et diverses activités socio-culturelles. On peut participer à des ateliers pour l’éducation des enfants, jouer, faire de la musique, du yoga… Il y en a pour tous les goûts et pour tous les âges : c’est une maison intergénérationnelle.

Prendre soin de son alimentation et de son milieu de vie

Pour Emmanuelle Temple et Marie-Paulle Denorme, fondatrices de la Maison Garbay et bénévoles, l’alimentation est une préoccupation majeure : « Cela impacte notre santé et notre vie. Nos choix alimentaires influencent la société, l’économie, l’écologie… ». La Maison Garbay incarne ce soin à l’alimentation en se fournissant en productions locales (deux tiers des achats), ce qui « suppose beaucoup de temps pour les contacts avec les producteurs ou fabricants et la livraison des produits vers notre village relativement isolé – la solution du grossiste est effectivement tellement plus rapide…. mais ne satisfait pas notre volonté de mettre en place des circuits courts ». Les bénévoles en savent quelque chose puisque le dernier tiers des achatsprovient de grossistes relativement proches (100 kms maximum) spécialisés dans le bio. Locaux, bio, en vrac, les produits doivent être cependant accessibles au plus grand nombre : « Ce n’est pas une épicerie sociale avec des produits bas de gamme voire périmés et donc pas chers ! ». La Maison Garbay essaie de concilier juste prix pour la consommation et juste rémunération pour la production : « en tant qu’association, il ne s’agit pas de faire des profits mais de couvrir nos frais ». Aussi, de façon à limiter ses coûts et pour des raisons écologiques, elle se mobilise contre le gaspillage :« les discours ne suffisent pas, nous sommes par exemple très vigilants à utiliser, pour la restauration, les produits de l’épicerie avant qu’ils ne soient abimés ou défraichis ». Pour favoriser l’achat des produits qui doivent être rapidement consommés, ceux-ci sont identifiés par une pastille verte offrant une réduction de 30 %. Quant aux épluchures et autres déchets alimentaires issus de la restauration, ils permettent de nourrir les poules.

Des espaces d’échanges pour se former à la nutrition et à ses enjeux

Tous les mois, la Maison Garbay propose un atelier de sensibilisation à la nutrition. En plus de ces temps dédiés, les discussions plus informelles permettent d’échanger sur « l’intérêt de l’alimentation pour le bien être ». Des fiches « produits » et des ouvrages spécialisés sont à disposition du public. À côté des étals de produits à écouler rapidement, des recettes sont proposées. Les repas-concerts organisés sont des moments où « nous essayons de proposer des plats moins habituels mais aussi des plats végétariens », pour donner des envies et des idées. En somme « nous privilégions la vie locale, l’autonomie alimentaire, le développement économique local et à terme nous limitons les risques d’exode rural en facilitant le vivre ensemble, l’entraide, l’échange, le développement des compétences existantes et les circuits courts ».

Contact : info@maisongarbay.fr 

* article paru dans Transrural initiatives, numéro 495, 2023