Enchanter nos mondes

Enchanter nos mondes29/12/2023

Démasquer la violence mimétique : une tâche éducative

L’apport possible de la Théorie mimétique issue des écrits de René Girard pour l’auto-analyse de la contagion émotionnelle et des mécanismes de la violence collective

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{"props":{"pageProps":{"category":{"id":"dGVybTo2NTUz","name":"Enchanter nos mondes","posts":{"nodes":[{"id":"cG9zdDoyMTk2","title":"Démasquer la violence mimétique : une tâche éducative","uri":"/2023/12/29/demasquer-la-violence-mimetique-une-tache-educative/","date":"2023-12-29T20:30:58","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"}]},"slug":"demasquer-la-violence-mimetique-une-tache-educative","content":"\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003e\u003cem\u003eL\u0026#8217;apport possible de la Théorie mimétique issue des écrits de René Girard pour l\u0026#8217;auto-analyse de la contagion émotionnelle et des mécanismes de la violence collective\u003c/em\u003e\u003c/strong\u003e\u003cstrong\u003e\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-large\"\u003e\u003cimg loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"699\" height=\"1024\" data-attachment-id=\"2198\" data-permalink=\"https://changement-de-cap.fr/2023/12/29/demasquer-la-violence-mimetique-une-tache-educative/perretgirard/\" data-orig-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?fit=1366%2C2000\u0026amp;ssl=1\" data-orig-size=\"1366,2000\" data-comments-opened=\"1\" data-image-meta=\"{\u0026quot;aperture\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;credit\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;camera\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;caption\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;created_timestamp\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;copyright\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;focal_length\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;iso\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;shutter_speed\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;title\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;orientation\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;}\" data-image-title=\"PerretGirard\" data-image-description=\"\" data-image-caption=\"\" data-medium-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?fit=205%2C300\u0026amp;ssl=1\" data-large-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?fit=699%2C1024\u0026amp;ssl=1\" src=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=699%2C1024\u0026#038;ssl=1\" alt=\"\" class=\"wp-image-2198\" srcset=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=699%2C1024\u0026amp;ssl=1 699w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=205%2C300\u0026amp;ssl=1 205w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=768%2C1124\u0026amp;ssl=1 768w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=1049%2C1536\u0026amp;ssl=1 1049w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=1200%2C1757\u0026amp;ssl=1 1200w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?w=1366\u0026amp;ssl=1 1366w\" sizes=\"(max-width: 699px) 100vw, 699px\" data-recalc-dims=\"1\" /\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eIl est à peine besoin de souligner la gravité permanente du problème de la violence et le caractère préoccupant de son apparente recrudescence au sein même de notre société. Il existe bien entendu différentes sortes de violence\u0026nbsp;: chacun peut être agressé par un inconnu, chez soi ou dans la rue, sans d\u0026#8217;autre motif que le vol ou, si l\u0026#8217;on est une femme, la prédation sexuelle. Toutefois, les phénomènes qui font de la violence un véritable problème de société, des violences urbaines aux phénomènes de harcèlement, s\u0026#8217;inscrivent souvent dans des dynamiques collectives et/ou relationnelles dans lesquelles la responsabilité d\u0026#8217;individus ordinaires \u0026#8211; potentiellement de tout un chacun \u0026#8211; est directement engagée. Il en est ainsi chaque fois qu\u0026#8217;entrent en jeu une situation de rivalité, de frustration sociale, un désir de revanche ou de vengeance, le besoin de faire supporter à autrui une situation de souffrance, ou encore le besoin d\u0026#8217;\u0026nbsp;«\u0026nbsp;expulser\u0026nbsp;» par le moyen d\u0026#8217;un bouc émissaire la violence latente au sein d\u0026#8217;un groupe traversé de multiples frustrations et rivalités.\u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eParmi d\u0026#8217;autres outils, la théorie mimétique issue des écrits de René Girard (1923-2015) pourrait être mobilisée pour développer et diffuser une intelligence concrète des mécanismes de la violence, particulièrement quand elle se manifeste au sein d\u0026#8217;un groupe ou qu\u0026#8217;elle est exercée collectivement par un groupe\u003ca href=\"#_ftn1\" id=\"_ftnref1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e. Précisons d\u0026#8217;emblée que l\u0026#8217;on ne trouvera rien de directement utile sur ce sujet dans les livres de René Girard. Il était trop pessimiste et «\u0026nbsp;apocalyptique\u0026nbsp;» \u0026#8211; persuadé que nos sociétés devront tôt ou tard choisir entre l\u0026#8217;auto-destruction violente et une conversion spirituelle radicale \u0026#8211; pour s\u0026#8217;intéresser aux applications possibles de ses idées dans un but d\u0026#8217;éducation et de transformation sociale. Mais rien n\u0026#8217;interdit de le faire à sa place, en s\u0026#8217;emparant de ses idées. L\u0026#8217;un des principaux mérites de la «\u0026nbsp;théorie mimétique\u0026nbsp;» dont il a posé les bases est d\u0026#8217;aider à prendre conscience du fait que la violence n\u0026#8217;est pas une anomalie, une pathologie accidentelle des relations humaines que l\u0026#8217;on pourrait expliquer et combattre en isolant et éradiquant ses causes sociales et psychopathologiques – frustrations causées par les inégalités, déficits de socialisation, perte de sens moral ou actions d\u0026#8217;individus particulièrement pervers. L\u0026#8217;approche mimétique conduit à un renversement de perspective\u0026nbsp;: elle oblige à reconnaître \u003cem\u003el\u0026#8217;instabilité fondamentale des relations humaines \u0026#8211; \u003c/em\u003ele fait que nous sommes tous, dans certaines circonstances, à risque de devenir persécuteurs, complices, ou bien-sûr victimes de la violence collective. Elle met en évidence\u003cem\u003e, \u003c/em\u003ele fait que notre dépendance psychique à autrui structure en profondeur nos désirs et nos affects. Cet autrui étant toujours susceptible de devenir pour nous un modèle (celui dont nous imitons les désirs), un obstacle (celui qui s\u0026#8217;oppose à la réalisation de ces désirs) ou un rival à abattre ou dominer. De là résulte, au sein des groupes humains sans structure répressive ou symbolique forte, un chaos relationnel et émotionnel qui peut à tout moment cristalliser en violence physique, psychologique ou symbolique. En résumé\u0026nbsp;: la violence n\u0026#8217;est pas seulement un problème qui existe en dehors de nous et auquel nous sommes parfois injustement confrontés, mais une réalité constitutive de la vie sociale dont nous sommes toujours plus ou moins partie prenante dès lors que nous sommes membres d\u0026#8217;un collectif, quel qu\u0026#8217;il soit.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn comprend mieux à partir de là comment s\u0026#8217;agencent et se complètent les différents moyens ordinairement mis en œuvre par les collectifs de toute nature pour gérer et contrôler leur propre violence. Ces moyens peuvent être vertueux ou franchement pathologiques, relever d\u0026#8217;une dynamique mimétique spontanée ou de dispositifs sociaux de contrôle ou d\u0026#8217;endiguement. Du côté des pratiques habituellement vertueuses de «\u0026nbsp;métabolisation\u0026nbsp;» des rivalités, on peut citer le sport, le jeu, toutes les activités génératrices de saine émulation et de coopération. Du côté du pathologique, on a soit la polarisation interne de la violence sur un souffre-douleur ou «\u0026nbsp;bouc émissaire\u0026nbsp;» (typiquement, le harcèlement), soit l\u0026#8217;externalisation dans la violence entre bandes (tous unis contre\u0026#8230;), entre groupes sociaux ou contre les symboles de l\u0026#8217;ordre social (y compris la police\u0026#8230;), sans oublier la guerre.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLes ressorts fondamentaux de cette mécanique sociale de la violence sont plutôt faciles à comprendre. Acquérir un minimum de culture et d\u0026#8217; « éléments de langage » à ce sujet ne serait déjà pas si mal. On peut en attendre une meilleurs capacité à repérer dans la vie de tous les jours la figure du bouc émissaire derrière celle de l\u0026#8217;individu harcelé, le souffre-douleur dont tout groupe a plus ou moins besoin pour se sentir exister pleinement. On peut en attendre aussi, pour les adultes, une conscience plus aiguisée du rôle de la contagion émotionnelle, du ressentiment, des pulsions vengeresses et de la facilité avec laquelle ces sentiments inévitables peuvent être instrumentalisés par des leaders cyniques. Dans une perspective éducative, on peut toutefois être plus ambitieux et réfléchir à des techniques plus actives de conscientisation et de transformation des comportements.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eAvant de voir quelles pratiques d\u0026#8217;éducation et de transformation sociale pourraient être imaginées dans cette perspective – principalement des mises en situation contrôlées permettant aux participants de s\u0026#8217;identifier aux différents «\u0026nbsp;rôles\u0026nbsp;» qu\u0026#8217;il sont susceptibles de tenir dans une situation de violence, voici en résumé les principaux messages dont il faudrait faciliter l\u0026#8217;assimilation\u0026nbsp;:\u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003col\u003e\n\u003cli\u003eLa rivalité est inhérente aux relations humaines, c\u0026#8217;est la conséquence de la nature mimétique de nos désirs et de nos émotions \u0026#8211; nous avons tendance à désirer ce que possèdent ou désirent les autres, à vouloir «\u0026nbsp;être comme eux\u0026nbsp;», à chercher à les dominer ou à avoir peur qu\u0026#8217;ils nous dominent d\u0026#8217;une manière ou d\u0026#8217;une autre.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa rivalité débouche souvent sur la violence, même si elle peut aussi s\u0026#8217;exprimer plus ou moins pacifiquement dans la compétition et l\u0026#8217;émulation (économique, sportive, scolaire, etc.)\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence est toujours potentiellement «\u0026nbsp;transitive\u0026nbsp;» et réciproque. Toute violence subie et ressentie appelle une réponse. Celle-ci peut être une rétorsion directe ou une vengeance différée, mais elle peut aussi consister à reporter la violence sur un tiers étranger au conflit.\u0026nbsp;\u0026nbsp;\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence est contagieuse. Le spectacle de la violence nous affecte et nous sommes toujours spontanément tentés de nous identifier à l\u0026#8217;un ou l\u0026#8217;autre camp (afin d\u0026#8217;être \u003cem\u003eunis contre\u003c/em\u003e\u0026#8230;).\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence latente au sein d\u0026#8217;un groupe tend spontanément vers la polarisation. L\u0026#8217;animosité diffuse «\u0026nbsp;coagule\u0026nbsp;» et se porte vers un individu particulier, un souffre-douleur ou «\u0026nbsp;bouc émissaire\u0026nbsp;»\u0026nbsp;: généralement une personne «\u0026nbsp;différente\u0026nbsp;», par son aspect physique, son orientation sexuelle, ses difficultés relationnelles, etc. Décharger sa violence sur un «\u0026nbsp;mouton noir\u0026nbsp;» ou sur un ennemi extérieur permet au groupe de conforter son unité en toute bonne conscience.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence a le pouvoir de susciter sa propre «\u0026nbsp;mise en récit\u0026nbsp;». Pour René Girard, c\u0026#8217;est l\u0026#8217;essence des mythes d\u0026#8217;origine. Tout groupe a besoin d\u0026#8217;un récit fédérateur dans lequel la violence légitimée et la «\u0026nbsp;conscience victimaire\u0026nbsp;» (la conviction d\u0026#8217;appartenir à un collectif qui a été victime de violence ou menacé de l\u0026#8217;être) occupent toujours une grande place.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eL\u0026#8217;unanimité persécutrice peut facilement s\u0026#8217;inverser en compassion unanime à l\u0026#8217;égard d\u0026#8217;une victime. La contagion émotionnelle joue aussi bien en faveur de l\u0026#8217;unanimité compassionnelle que de la violence. On passe d\u0026#8217;ailleurs facilement de l\u0026#8217;un à l\u0026#8217;autre.\u0026nbsp;\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eIl est souvent possible, même pour un individu isolé, d\u0026#8217;agir concrètement pour désamorcer la violence (manifestation de solidarité à l\u0026#8217;égard du souffre-douleur, geste de réconciliation, appel au calme et à la raison\u0026#8230;). Il suffit parfois d\u0026#8217;un geste ou d\u0026#8217;une parole pour enrayer une spirale persécutrice (« que celui qui n\u0026#8217;a pas pêché lui jette la première pierre\u0026#8230; »). Cela suppose d\u0026#8217;être soi-même capable de décrypter la situation et de dominer ses propres passions. \u003c/li\u003e\n\u003c/ol\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eTout cela pourrait être largement développé et argumenté en s\u0026#8217;appuyant, notamment, sur les avancées récentes de la neuropsychologie – les «\u0026nbsp;neurones miroirs\u0026nbsp;». Mais aussi en faisant appel à la littérature, roman et théâtre. Les grands auteurs ont souvent décrit les passions humaines dans des termes qu\u0026#8217;éclaire très pédagogiquement la théorie mimétique (rivalités, contagion, escalade catastrophique de la violence, aveuglement auto-destructeur\u0026#8230;cf les tragiques grecs, les grands romanciers et Shakespeare\u0026#8230;). On peut aussi penser au cinéma, et plus largement aux documents audiovisuels (actualités, etc.).\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eL\u0026#8217;approche théorique, toutefois, suffit rarement pour transformer en profondeur les comportements. Pour susciter des prises de conscience et des transformations de comportement plus profondes, c\u0026#8217;est vers les techniques de la \u003cem\u003edynamique de groupe\u003c/em\u003e qu\u0026#8217;il faudrait se tourner. Il s\u0026#8217;agit d\u0026#8217;un vaste domaine de recherches et de pratiques d\u0026#8217;intervention, largement mobilisé à des fins de management d\u0026#8217;entreprise depuis la seconde guerre mondiale. Les techniques développées dans ce cadre – groupes d\u0026#8217;observation, jeux de rôles, etc. \u0026#8211; pourraient sans difficulté être utilisées à des fins d\u0026#8217;auto-analyse des phénomènes mimétiques et de la violence au sein d\u0026#8217;un groupe. Il «\u0026nbsp;suffirait\u0026nbsp;» pour cela de former suffisamment d\u0026#8217;enseignants et d\u0026#8217;animateurs capables de «\u0026nbsp;décrypter\u0026nbsp;» pour les participants les processus à l\u0026#8217; œuvre, à l\u0026#8217;aide d\u0026#8217;une grille d\u0026#8217;analyse inspirée de la théorie mimétique (sans exclure d\u0026#8217;autres apports).\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref1\" id=\"_ftn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e\u0026nbsp;\u0026nbsp;\u0026nbsp; Voir mon livre \u003cem\u003eViolence des dieux, violence de l\u0026#8217;homme. René Girard notre contemporain\u003c/em\u003e (Seuil 2023)\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDcwMTA="}}},{"id":"cG9zdDoyMTMz","title":"« C’est quoi la vie ?» à la lumière des sciences modernes","uri":"/2023/11/15/cest-quoi-la-vie-a-la-lumiere-des-sciences-modernes/","date":"2023-11-15T18:50:36","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"}]},"slug":"cest-quoi-la-vie-a-la-lumiere-des-sciences-modernes","content":"\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-full\"\u003e\u003cimg loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"324\" height=\"243\" data-attachment-id=\"2138\" data-permalink=\"https://changement-de-cap.fr/2023/11/15/cest-quoi-la-vie-a-la-lumiere-des-sciences-modernes/perrin-2/\" data-orig-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?fit=324%2C243\u0026amp;ssl=1\" data-orig-size=\"324,243\" data-comments-opened=\"1\" data-image-meta=\"{\u0026quot;aperture\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;credit\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;camera\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;caption\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;created_timestamp\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;copyright\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;focal_length\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;iso\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;shutter_speed\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;title\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;orientation\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;}\" data-image-title=\"Perrin\" data-image-description=\"\" data-image-caption=\"\" data-medium-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?fit=300%2C225\u0026amp;ssl=1\" data-large-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?fit=324%2C243\u0026amp;ssl=1\" src=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?resize=324%2C243\u0026#038;ssl=1\" alt=\"\" class=\"wp-image-2138\" srcset=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?w=324\u0026amp;ssl=1 324w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?resize=300%2C225\u0026amp;ssl=1 300w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?resize=200%2C150\u0026amp;ssl=1 200w\" sizes=\"(max-width: 324px) 100vw, 324px\" data-recalc-dims=\"1\" /\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans l’article \u003cem\u003e\u003ca href=\"https://www.eccap.fr/article/du-sentiment-de-peur-au-desir-de-vivre\"\u003eDu sentiment de peur au désir de vivre\u003c/a\u003e\u003c/em\u003e, on concluait, à la lumière de Spinoza, que pour sortir de nos peurs (du changement climatique, de l’effondrement de la biodiversité, de la montée des discours haineux et des conflits armés, de la croissance des inégalités, des différentes formes de déclassement social,…), pour modifier en profondeur nos modes de vie, pour sortir de nos enfermements économique, culturel et politique, il nous fallait réanimer notre désir de vivre. On rappelait aussi que le désir de vivre, comme tout désir, mobilise la totalité de notre être (esprit et corps), c’est à dire nos capacités à la fois de raisonner et d’être en résonance par nos cinq sens avec nos milieux de vie matériel et immatériel (symbolique, imaginaire, culturel, spirituel, …). Plus fondamentalement, pour réanimer notre désir de vivre, il nous faut changer nos visions du monde et notre manière d’être au monde\u003csup data-fn=\"9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a\" id=\"9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a-link\"\u003e1\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Par rapport à cette quête existentielle, il est judicieux de remarquer que dans plusieurs disciplines scientifiques (biologie, astrophysique, neurosciences, anthropologie, éthologie,…) de nouveaux courants de pensée permettent d’apporter de nouvelles réponses au questionnement « c’est quoi vivre ? »\u003csup data-fn=\"82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1\" id=\"82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1-link\"\u003e2\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Ces nouvelles connaissances scientifiques nous offrent l’opportunité d’imaginer d’autres manières d’être au monde, d’être en résonance et de vibrer d’une manière plus intense avec nos différents milieux de vie, c’est-à-dire de réanimer notre désir de vivre.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eL’Univers est à l’intérieur de nous\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eÉveiller nos consciences à la magie de l’univers, c’est l’objectif que plusieurs astrophysiciens se sont donnés. On se souvient de la proposition d’Hubert Reeves : « nous sommes tous de la poussière d’étoiles ». Pour Trinh Xuan Thuan, « la cosmologie moderne a réenchanté le monde, en redécouvrant l’ancienne alliance entre l’homme et le cosmos ». Nos atomes d’hydrogène ont été fabriqués en moins de trois minutes, lors du big bang initial qui a eu lieu il y a 13,5 milliards d’années. Tous les autres atomes qui composent le corps humain, tels l’oxygène, le carbone, le calcium, le magnésium, etc.,  sont nés, soit de la fusion nucléaire au cœur des étoiles, soit dans les \u003cem\u003esupernovae\u003c/em\u003e, explosions géantes résultant de la mort des étoiles massives . « Ainsi, les étoiles sont nos lointains ancêtres et nous partageons tous la même généalogie cosmique. Nous sommes les frères des lions de savane et les cousins des coquelicots des champs »\u003csup data-fn=\"3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d\" id=\"3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d-link\"\u003e3\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eL’histoire de la vie est à l’intérieur de nous\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eJean François Dortier, fondateur de la revue \u003cem\u003eSciences Humaines\u003c/em\u003e et de la revue \u003cem\u003eHumanologue\u003c/em\u003e, en mobilisant les connaissances de l’astrophysique et de la biologie nous rappelle que : « Notre corps est composé de 65% d’eau. Cette eau vient des rivières, des lacs, des océans. Mais toute l’eau sur terre s’est formée aussi dans l’espace. Au fil du temps, c’est une pluie de météorites glacées qui ont formé les océans et les mers »\u003csup data-fn=\"92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1\" id=\"92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1-link\"\u003e4\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Et de rajouter : « La vie est née dans l’océan. Et pendant trois milliards d’années, elle y est restée. Puis les premiers organismes (des bactéries), des plantes, puis des animaux sont sortis des mers et ont colonisé la Terre. Nous autres, animaux terrestres, croyons avoir quitté notre océan primordial il y a bien longtemps. C’est faux. Nous restons des animaux marins. A la seule différence que nous transportons l’océan en nous ».\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eLa symbiose, principal processus d’innovation du monde vivant\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans son livre \u003cem\u003eJamais seul, ces microbes qui construisent les plantes, les animaux et les civilisations\u003c/em\u003e, le biologiste Marc André Selosse nous invite à découvrir que les symbioses microbiennes \u0026#8211; qui ont émergé tardivement dans la biologie moderne- «\u0026nbsp;envahissent aujourd’hui notre vision du vivant\u0026nbsp;». Cet ouvrage décrit comment les animaux (et donc les humains), mais aussi les plantes, sont intimement construits par les micro-organismes (des bactéries, des micro-champignons, des levures) qui les habitent, et les aident à accomplir des fonctions variées et souvent vitales.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa symbiose au sens large, c’est-à-dire vivre ensemble, est le principal processus d’innovation dans le monde vivant. Par exemple, la formation des cellules des plantes et des animaux (et donc les nôtres) qui constitue «\u0026nbsp;une découverte majeure de la biologie moderne\u0026nbsp;», est le résultat d’un processus de symbiose entre plusieurs bactéries qui sont devenues à l’intérieur de nos cellules des composants vitaux pour la respiration et la photosynthèse.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eVivre, \u0026nbsp;c’est inter-agir avec son milieu\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eS’appuyant sur les connaissances de la biologie et des neurosciences, le philosophe et anthropologue François Flahaut\u003csup data-fn=\"d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d\" id=\"d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d-link\"\u003e5\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e propose de considérer l’écologie, comme une avancée scientifique qui consiste à penser le vivant avec ce qui le fait vivre, à penser l’organisme et  son biotope. Et de préciser : « Nous voyons bien que nous dépendons de la nourriture que nous mangeons, de l’air que nous respirons, l’alternance du jour et de la nuit : l’écologie physique ; il nous est cependant plus difficile de prendre conscience de l’écologie psychique dont nous dépendons. Pour passer de l’ontologie substantialiste\u003csup data-fn=\"0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358\" id=\"0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358-link\"\u003e6\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e à une ontologie relationnelle, il nous faut intégrer et assumer le fait que nous dépendons de toutes sortes d’aléas qui ne dépendent pas de nous. On croyait pouvoir maîtriser et voilà qu’il nous « faut faire avec »\u003csup data-fn=\"706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5\" id=\"706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5-link\"\u003e7\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. L’homme, en son activité psychique, est lui aussi soumis à la propension à vivre qui anime tous les vivants et aux contraintes de son environnement : « notre je est le fruit d’une symbiose complexe entre biologie, société et culture ». Il est urgent d’abandonner notre conception occidentale de l’individu :  un être autonome, auto-existant, indépendant. En concevant le sujet humain comme un être relationnel, qui déploie son désir d’exister en étant affecté par ce qui l’entoure. F. Flahault nous propose « une image nouvelle de ce que nous sommes ».\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa science moderne, la science en train de se faire, qui relève principalement de la raison, nous offre l’opportunité de construire de nouveaux imaginaires, de nouvelles images de ce que nous sommes, et de pouvoir ainsi augmenter notre capacité d’entrer en résonance avec nos différents milieux de vie. On rejoint ainsi par la science une caractéristique universelle des êtres humains que d’autres civilisations ont expérimenté par intuition, à partir de leurs relations symbiotiques avec le tout existant. Selon le philosophe camerounais Achille Mbembé « dans les systèmes africains de pensée, le propre du vivant était son indétermination, c’est-à-dire sa capacité de prolifération, de métamorphose permanente et de résonance avec tout l’existant ou encore les forces du cosmos »\u003csup data-fn=\"df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603\" id=\"df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603-link\"\u003e8\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Dans son livre, \u003cem\u003eDevenir vivants\u003c/em\u003e, la philosophe Kodjo-Grandvaux nous avertit qu’il ne suffit pas de se représenter le monde, encore faut-il l’éprouver pour le connaître. « L’individu moderne rationnel, doit réapprendre à laisser parler son corps et ne plus être uniquement dans un rapport d’extériorité aux choses pour renouer avec l’émotion et l’intuition, cette intelligence qui comprend le monde ». Et de préciser, étymologiquement comprendre c’est « saisir ensemble », c’est en d’autres termes être en relation symbiotique, en résonance avec le tout existant.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\u003col class=\"wp-block-footnotes\"\u003e\u003cli id=\"9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a\"\u003eJacques Perrin, \u003cem\u003ePeut-on changer notre vision du monde ?\u003c/em\u003e Librinova, 2021. \u003ca href=\"#9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 1\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1\"\u003eOn ne traitera dans cet article que de quelques exemples. \u003ca href=\"#82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 2\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d\"\u003eTrinh Xuan Thua, \u003cem\u003eFace à l’Univers, \u003c/em\u003eEditions Autrement, 2015. \u003ca href=\"#3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 3\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1\"\u003eJean François Dortier, \u0026#8220;L’univers est en nous\u0026#8221;\u003cem\u003e, L’Humanologue\u003c/em\u003e, septembre 2021, pp. 95-96 \u003ca href=\"#92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 4\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d\"\u003eFrançois Flahault, \u003cem\u003eL’homme une espèce déboussolée, Anthropologie générale à l’âge de l’écologie,\u003c/em\u003e Fayard 2018. \u003ca href=\"#d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 5\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358\"\u003eOntologie : philosophie de l’être, s’interroge sur qu’est-ce que l’être ? Descartes, avec sa version sécularisée de l’âme comme « substance » pensante, est l’un des plus grands représentants de l’ontologie classique. \u003ca href=\"#0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 6\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5\"\u003eFrançois Flahault, \u003cem\u003eop. cit.,\u003c/em\u003e p. 43. \u003ca href=\"#706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 7\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603\"\u003eAchille Mbembe, \u0026#8220;Réinventer la démocratie à partir du vivant\u0026#8221;, \u003cem\u003eLe Monde\u003c/em\u003e, 13 août 2019. \u003ca href=\"#df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 8\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003c/ol\u003e\n\n\n\u003cp\u003e\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDY5NzM="}}},{"id":"cG9zdDoxOTcz","title":"Construire notre récit commun","uri":"/2023/07/02/construire-notre-recit-commun/","date":"2023-07-02T12:57:50","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"}]},"slug":"construire-notre-recit-commun","content":"\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-large\"\u003e\u003cimg decoding=\"async\" src=\"https://media.licdn.com/dms/image/D4E22AQFLv4iGzveYCg/feedshare-shrink_800/0/1684786946026?e=1691020800\u0026amp;v=beta\u0026amp;t=rFNGgJ7r9Ga8F2xF3Wn-cfkj7mNRsp0wjcmX1jGdDeI\" alt=\"\"/\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eA la suite de la proposition de plan d\u0026#8217;action de Bastien Sibille, visant à :\u003cbr\u003e\u0026#8211; nous relier (construire \u003cstrong\u003enotre récit commun\u003c/strong\u003e et de la confiance)\u003cbr\u003e\u0026#8211; nous renforcer (créer un fonds citoyen visant 1 milliard d\u0026#8217;euros)\u003cbr\u003e\u0026#8211; étendre notre capacité d\u0026#8217;action (Documenter, former, accompagner les initiatives naissantes ; Gagner en visibilité ; Préparer l\u0026#8217;extension du réseau). \u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eGuy Roustang a rédigé la note suivante pour contribuer à la réflexion sur le récit commun à construire. \u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eSelon Patrick Viveret, Laurent Berger posait la question : « Que ferions-nous si nous étions aux manettes ? » Pour répondre à cette question, il est essentiel de présenter un projet désirable et crédible qui permette de lutter contre les abstentions avec la menace de voir le Rassemblement National arriver au pouvoir après la politique néolibérale désespérante d’E.Macron\u003ca id=\"_ftnref1\" href=\"#_ftn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e. Un projet qui soit écologique, sociale et démocratique\u003ca id=\"_ftnref2\" href=\"#_ftn2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e et qui permette de satisfaire une grande partie de la population.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eProjet à diffuser chaleureusement avec le plaisir d’alimenter les combats des jeunes générations, de transmettre ce que nous savons. Tirer les leçons des échecs et ridiculiser les nantis qui utilisent les jets privés. Avoir une diversité d’argumentaires. Admirer l’intérêt du souci de la nature et des animaux, se rallier à de nouvelles façons de sentir (Descola et Mbembé) et respecter (voir le petit livre d’Agathe Cagé «\u0026nbsp;Respect\u0026nbsp;»). \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDenis Clerc devrait être fier d’avoir créé Alter Eco plutôt que de perdre espoir, et Alain Caillé fier du convivialisme au lieu de se désoler que «\u0026nbsp;rien ne marche\u0026nbsp;». Peut-être est-il temps de passer la main\u003ca href=\"#_ftn3\" id=\"_ftnref3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e, de considérer que c’est aux jeunes de reprendre le flambeau, qu’ils sont «\u0026nbsp;le monde de demain\u0026nbsp;».\u0026nbsp; \u0026nbsp;C’est ma façon d’interpréter ce que nous dit Dorothée Browayes\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;Il y a assez de jeunes générations engagées dans cette démarche pour les rejoindre, plutôt que de croire à un ralliement à nos idées !\u0026nbsp;»\u003ca href=\"#_ftn4\" id=\"_ftnref4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e. Intéressant de constater aussi que Bastien Sibille nous propose un «\u0026nbsp;plan d’action\u0026nbsp;» sans en rester au niveau des idées en espérant que nous pouvons faire confiance à son charisme d’entrepreneur. Le «\u0026nbsp;récit commun\u0026nbsp;» est la première étape de ce plan, dont nous ne pouvons pas savoir ce qu’il donnera. Comment s’organisera la réunion du 6 juillet aux Bernardins\u0026nbsp;? Je me le demande bien en notant par exemple que nous sommes 80 à nous être inscrits dans le projet de récit commun.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eNous ne nous mettons pas à la place des partis politiques\u003c/strong\u003e et ne prétendons pas agir à leur place mais il me semble que nous sommes en amont des luttes électorales, que nous préparons le terrain aux partis de gauche en agissant de telle façon qu’ils aient tout intérêt à s’inscrire dans ce que nous aurons préparé.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eAssurer la diffusion de ce que nous proposons\u003c/strong\u003e par de multiples canaux, notamment la Revue dessinée, éd. du Seuil, qui a créé des bandes dessinées sur «\u0026nbsp;Capital et Idéologie\u0026nbsp;» d’après le livre de T.Piketty, ou «\u0026nbsp;On leur vend des armes\u0026nbsp;»…et le pire c’est qu’ils s’en servent\u0026nbsp;». Pour diffuser largement notre récit commun, pourrait-on aboutir à un opuscule de quelques dizaines de pages\u0026nbsp;?\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eSur certains sujets, il devrait être possible d’intéresser des \u003cstrong\u003egens de bonne volonté\u003c/strong\u003e et de dépasser les oppositions gauche-droite.\u0026nbsp; Je pense par exemple à un rapport parlementaire signé par diverses tendances politiques qui avaient souligné la honte du sous équipement des services publics en Seine St Denis, de même un rapport de 4 sénatrices de divers partis qui dénoncaient la diffusion de la pornographie. Sur la régulation des Gafam gauche et droite ne pourraient-elles pas s’unir etc. etc.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eUne question importante selon moi\u0026nbsp;: Ne doit-on pas \u003cstrong\u003eenvisager des formations\u003c/strong\u003e\u0026nbsp;autour de nos propositions\u0026nbsp;? Des formations par l’université numérique\u0026nbsp;? Par les divers canaux d’éducation populaire\u0026nbsp;? \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eNe pas se contenter d’un public déjà acquis et surtout \u003cstrong\u003es’intéresser à ceux qui s’abstiennent\u003c/strong\u003e parce qu’ils ne croient plus que des politiques pourraient changer leur situation. D’où l’intérêt de textes comme ceux d’Ulysse Rabaté (La politique beurk,beurk) du Bondy blog ou des livres de Fatima Ouassak\u003ca href=\"#_ftn5\" id=\"_ftnref5\"\u003e[5]\u003c/a\u003e. \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eVoici quelques thèmes à privilégier (parmi beaucoup d’autres) que je me contente de lister pour l’instant\u003ca href=\"#_ftn6\" id=\"_ftnref6\"\u003e[6]\u003c/a\u003e, puisque je ne sais pas sous quelle forme sera rédigé le récit commun, 1\u003csup\u003eère\u003c/sup\u003e cible du Plan d’action de Bastien Sibille.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cul\u003e\n\u003cli\u003e\u0026nbsp;\u003cstrong\u003eRéchauffement climatique\u003c/strong\u003e voir les alliés du compte Carbonne individuel avec Pierre Calame.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eComment entendre ce que nous dit Fatima Ouassak\u003c/strong\u003e\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;l’écologie politique et électorale n’est pas du tout implantée dans les quartiers populaires\u0026nbsp;» bien plus «\u0026nbsp;le rapport de domination politique exercé par les classes moyennes supérieures blanches au nom de l’écologie risque de s’exacerber avec la crise climatique\u0026nbsp;» (pp. 80/81 de son livre «\u0026nbsp;Ecologie pirate\u0026nbsp;»)\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eFinancement de la politique\u003c/strong\u003e. Dans son livre «\u0026nbsp;Le prix de la démocratie\u0026nbsp;» Julia Cagé soutient, chiffres à l’appui, que l’argent a un rôle déterminant dans le résultat d’une élection. Pire : l’Etat subventionne davantage les orientations politiques des plus aisés, favorisant ainsi les partis de droite. Les plus pauvres paient pour satisfaire les préférences politiques des plus riches (voir son interview dans Libération reproduit dans ECCAP, auteur ECC). Des propositions remédiant à cette question «\u0026nbsp;oubliée\u0026nbsp;» s’impose absolument.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eAssurer l’indépendance des médias\u003c/strong\u003e aujourd’hui sous la coupe d’une dizaine de milliardaires.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLe manifeste fiscal, juste et féministe d’Oxfam du 9 décembre 2021 montrait \u003cstrong\u003ecomment\u003c/strong\u003e \u003cstrong\u003eune autre fiscalité permettrait de mieux financer les services publics\u003c/strong\u003e. Intéressant de noter au passage qu’Oxfam participe aussi bien au «\u0026nbsp;Pacte Pouvoir de vivre\u0026nbsp;» appuyé par la CFDT, qu’à «\u0026nbsp;Plus jamais ça\u0026nbsp;» soutenu par la CGT.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003ePour éviter une société d’héritiers\u003c/strong\u003e, voir la note de France Stratégie de Clément Dherbicourt de janvier 2017. Parmi les suggestions\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;On peut imaginer par exemple que l’État verse un capital au dix-huitième anniversaire de tous les individus\u0026nbsp;»\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003e«\u0026nbsp;Pour rompre avec l’élitisme monarchique français\u003c/strong\u003e…élargir considérablement l’aire de recrutement de nos élites en mettant (réellement en synergie) les classes préparatoires, les grandes écoles et l’université\u0026nbsp;» Voir Alain Caillé\u0026nbsp;« Si j’étais candidat\u0026nbsp;» p.47\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eEtc.\u003c/strong\u003e\u003c/li\u003e\n\u003c/ul\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref1\" id=\"_ftn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e Loin d’être le «\u0026nbsp;maître des horloges\u0026nbsp;», E.Macron est le garçon d’ascenseur qui fait monter Marine Le Peine aux étages supérieures.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref2\" id=\"_ftn2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e Plusieurs textes ont servi de base à la rédaction de cette note, citons plus particulièrement\u0026nbsp;: Paul Magnette\u0026nbsp;: La vie large\u0026nbsp;; F.Ruffin\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;Le temps d’apprendre à vivre\u0026nbsp;» Ed. Les liens qui libèrent, 2022\u0026nbsp;et\u0026nbsp;«\u0026nbsp;Je vous écris du front de la Somme\u0026nbsp;», même éditeur, 2022\u0026nbsp;; le Second manifeste des convivialistes\u0026nbsp;; A.Caillé «\u0026nbsp;Si j’étais candidat\u0026nbsp;» etc..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref3\" id=\"_ftn3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e Peut-être est-ce plus facile pour moi de «\u0026nbsp;passer la main\u0026nbsp;», moi qui suis d’une génération plus âgée que la plupart d’entre vous, par exemple qu’Hugues Sibille père de Bastien. Je peux reprendre ce que disait Véronique Decker directrice d’école pendant un quart de siècle en Seine St Denis : «\u0026nbsp;Si je m’interroge sur les résultats de nos luttes, le bilan est maigre. On n’a pas beaucoup avancé, mais ça m’a bien occupée ».\u0026nbsp; \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref4\" id=\"_ftn4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e Courriel de D.Browayes dans le débat des convivialistes le 13 juin 2023 à 16 h 39. Voir aussi «\u0026nbsp;Dialogue entre deux générations\u0026nbsp;» Ed. Les petits matins 2022 de Bastien Sibille et Hugues Sibille.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref5\" id=\"_ftn5\"\u003e[5]\u003c/a\u003e Fatima Ouassak a déjà écrit deux livres\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;La puissance des mères\u0026nbsp;» La Découverte 2020, «\u0026nbsp;Pour une écologie pirate-Et nous serons libres\u0026nbsp;» La Découverte 2023. Un troisième est annoncé qui traitera «\u0026nbsp;de l’organisation de la société\u0026nbsp;»\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref6\" id=\"_ftn6\"\u003e[6]\u003c/a\u003e Alain Caillé parle de «\u0026nbsp;mesures basculantes\u0026nbsp;».\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDcwMjQ="}}},{"id":"cG9zdDoxOTUw","title":"La déréalisation du monde, ou le syndrome de Don Quichotte","uri":"/2023/06/15/la-derealisation-du-monde-ou-le-syndrome-de-don-quichotte/","date":"2023-06-15T09:44:49","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"},{"name":"Une démocratie pour vivre ensemble","slug":"une-democratie-pour-vivre-ensemble"}]},"slug":"la-derealisation-du-monde-ou-le-syndrome-de-don-quichotte","content":"\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-full\"\u003e\u003cimg loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"218\" height=\"231\" data-attachment-id=\"1951\" data-permalink=\"https://changement-de-cap.fr/2023/06/15/la-derealisation-du-monde-ou-le-syndrome-de-don-quichotte/donquichotte/\" data-orig-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?fit=218%2C231\u0026amp;ssl=1\" data-orig-size=\"218,231\" data-comments-opened=\"1\" data-image-meta=\"{\u0026quot;aperture\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;credit\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;camera\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;caption\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;created_timestamp\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;copyright\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;focal_length\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;iso\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;shutter_speed\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;title\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;orientation\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;}\" data-image-title=\"donquichotte\" data-image-description=\"\" data-image-caption=\"\" data-medium-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?fit=218%2C231\u0026amp;ssl=1\" data-large-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?fit=218%2C231\u0026amp;ssl=1\" src=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?resize=218%2C231\u0026#038;ssl=1\" alt=\"\" class=\"wp-image-1951\" data-recalc-dims=\"1\"/\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa réalité, le présent, l’avenir surtout sont plus que sombres… Aux\u0026nbsp; angoisses métaphysiques éternelles (nous sommes des êtres mortels, limités, particuliers, etc) qui produisent depuis toujours, ainsi que le déplorait Pascal, une fuite vers le divertissement, s’ajoutent celles de l’époque.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe défi climatique, environnemental, la crise de l’énergie, les projets de psychopathes dangereux car puissants qui nous préparent l’humanité augmentée, les dangers de l’intelligence artificielle, tout cela se combine avec la marchandisation croissante de la société, et enfin l’orientation vers la généralisation de la société de surveillance sur le modèle chinois (le projet de loi sur les jeux olympiques de 2024 en France en offre des prémices). Est-il nécessaire de rappeler qu’à tout cela vient s’ajouter la guerre, et les risques croissants d’embrasement du monde..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eC’est pourtant bien dans la même galaxie que, lorsqu’on interroge nos contemporains en leur demandant s’ils sont heureux, et voient leur propre avenir avec optimisme, on obtient des chiffres impressionnants. Selon une enquête publiée en novembre 2021 par Elabe, l’Institut Montaigne en partenariat avec la SNCF et franceinfo, 78% des Français se déclarent heureux et 57% des Français envisagent leur avenir personnel avec optimisme\u003cstrong\u003e. \u003c/strong\u003eCes chiffres sont respectivement en hausse de cinq et dix points par rapport à l’année 2018.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eComment interpréter ce paradoxe, sinon par le fait que la plupart ne voient plus la réalité telle qu’elle est, mais telle qu’ils l’hallucinent\u0026nbsp;? Mais aussi que ces hallucinations sont – parfois volontairement –produites par le système capitaliste, et singulièrement par sa version néolibérale dans laquelle nous vivons.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDaniel Bell (\u003ca href=\"#_edn1\" id=\"_ednref1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e) avait déjà montré que le capitalisme produisait des comportements incompatibles avec les valeurs et croyances traditionnelles, et se retournait en quelque sorte contre la culture qui l’a engendré. Par exemple, l’épargne, une vertu traditionnelle («\u0026nbsp;la cigale et la fourmi\u0026nbsp;»\u0026nbsp;!) , entre en collision avec l’invention du crédit à la consommation, qui permet d’accéder à la\u0026nbsp; jouissance de l’objet, avant l’effort d’abstinence nécessaire pour se le procurer. Nous sommes à l’ère de la surconsommation.\u0026nbsp; D’ailleurs l’épargne n’est plus encouragée par les pouvoirs publics\u0026nbsp;; on constate au contraire la récurrente tentation de sanctionner fiscalement les gros épargnants.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003ePolanyi a montré (\u003ca href=\"#_edn2\" id=\"_ednref2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e) que l’encastrement de la société dans l’économie , caractéristique du capitalisme, conduisait à des catastrophes sociales.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eEn fait, les injonctions contradictoires sont permanentes\u0026nbsp;;\u0026nbsp; notamment entre les communications des pouvoirs publics, en matière de santé et d’énergie notamment, et la publicité. D’un côté le covoiturage, le vélo, les transports en commun, de l’autre des agences de tourisme invitant aux voyages lointains, et les constructeurs automobiles suggérant la puissance de leurs modèles… On pourrait multiplier les exemples.. Ce jeudi 25 mai encore, notre ministre Bruno Le Maire exaltait à Point-à-Pitre\u0026nbsp; l’extension du grand port maritime de la Guadeloupe\u0026nbsp; en stigmatisant la décroissance, et en incitant à développer les\u0026nbsp; transports. On oppose en chacun le consommateur et le citoyen\u0026nbsp;; notre société est devenue une machine à fabriquer de la schizophrénie.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn peut penser qu’on ne peut résoudre ces contradictions que par la fuite. Fuite dans les paradis artificiels ou le suicide, au pire, mais plus généralement fuite dans la fiction,\u0026nbsp; solution la plus facile pour échapper à la folie. Mais dans une fiction qui ne se présente pas comme telle, mais au contraire tient lieu de réalité. Il se fait qu’en plus, l’évolution de nos technologies facilite considérablement cette bascule mentale en dehors de la réalité. .\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eCharles Péguy avait pressenti cette propension à sortir de la réalité, en affirmant «\u0026nbsp;\u003cem\u003eIl faut toujours dire ce que l\u0026#8217;on voit. Surtout il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l\u0026#8217;on voit\u003c/em\u003e.\u0026#8221;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans son ouvrage «\u0026nbsp;le réel et son double\u0026nbsp;», (\u003ca href=\"#_edn3\" id=\"_ednref3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e) Clément Rosset évoquait la possibilité de cette transposition radicale, avec quelques exemples littéraires à l’appui.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eMolière d’abord. . Le misanthrope voit bien que Célimène est une cocotte ; mais il est aveugle, il n’accorde pas ses actes à sa perception.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans la pièce «\u0026nbsp;Boubouroche\u0026nbsp;» de Courteline, le personnage portant ce nom surprend sa femme en flagrant délit d’adultère, mais refuse en quelque sorte d’admettre la situation, et accepte une explication invraisemblable de son épouse, détournant ensuite sa colère sur un voisin.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eProust, dans \u003cem\u003ela recherche\u003c/em\u003e, nous donne deux autres exemples\u0026nbsp;: Dans un amour de Swann\u003cstrong\u003e, \u003c/strong\u003eSwann donne de l’argent à Odett\u003cstrong\u003ee\u003c/strong\u003e, mais refuse de voir que c’est une femme entretenue ; il distingue la femme aimée et la femme payée. Plus loin dans la recherche, Saint-Loup, un ami du narrateur aime Rachel\u0026nbsp;; or celle-ci est une ancienne prostituée\u0026nbsp;; elle est un moment apostrophée par d’anciennes «\u0026nbsp;poules\u0026nbsp;» la connaissant\u0026nbsp;; Saint-Loup n’en tient aucun compte.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eMais le plus instructif reste Don Quichotte.. Don Quichotte s’est fabriqué une réalité alternative, comme on dit maintenant, en dévorant tous les livres de chevalerie de son époque. Puis il s’est lancé sur les routes, avec son écuyer Sancho Panza, en transposant toutes les visions de la réalité pour les intégrer à son univers mental.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eL’épisode des moulins à vent pris pour des géants à combattre est connu\u0026nbsp;; mais cela fonctionne en permanence\u0026nbsp;; une hôtellerie est vue comme un château, avec ses tourelles et ses chapiteaux, les filles perdues qui s’y trouvent sont de belles demoiselles. Dans la poussière, des troupeaux de moutons se transforment en armées, et le vin des outres transpercées devient le sang de géants terrassés. Mais c’est surtout la transformation d’une paysanne très ordinaire en Dulcinée «\u0026nbsp;plus haute Princesse de la terre\u0026nbsp;» qui est exemplaire. Jamais ce ne sont de pures hallucinations, mais il y a toujours un composé subtil d’éléments réels et de fabrication imaginaire. Et face aux évidences éventuelles se mettent en marche des processus de rationalisation qui permettent de persister dans l’irréel\u0026nbsp;: pour Don Quichotte, c’est l’enchanteur Frestron qui le persécute, et lui trouble les sens, en l’empêchant de voir la vérité, à savoir celle de son monde enchanté, de lui faire voir par exemple une pauvre paysanne à la place de Dulcinée..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDe tels personnages existent dans la réalité contemporaine. Liz Truzz, première ministre britannique pendant six semaines, annonçait le 20 octobre 2022 sa démission. Fascinée dès l’enfance par Margaret Thatcher\u0026nbsp;; petite fille âgée de sept ans, elle a joué le personnage de Margaret Thatcher dans une pièce de théâtre à l\u0026#8217;école. \u0026nbsp;Elle s’habille comme elle, se fait photographier dans les mêmes postures, très souvent. Ses déclarations, puis son programme sont calqués sur le modèle de son idole… mais en complet décalage avec son époque, son échec est cuisant.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe modèle s’applique aussi peut-être à Poutine, si on accepte l’hypothèse (crédible) qu’il est sincère. Son fantasme se construit à partir d’images de la grande Russie tsariste, et il se voit comme une réincarnation\u0026nbsp; de Pierre le Grand, et produit les catastrophes que l’on sait.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eAu-delà de phénomènes individuels que l’on pourrait qualifier de pathologiques, ce syndrome de Don Quichotte est quelque chose qui concerne en fait\u0026nbsp; la très grande majorité de nos contemporains. Sans aller, comme l’évêque Berkeley au XVIIIème siècle, jusqu’à douter de l’existence de la réalité matérielle, il faut prendre conscience que non seulement, le monde extérieur n’est perçu qu’à travers nos perceptions, mais aussi que ces perceptions sont en même temps – plus que des reconstructions \u0026#8211; des constructions de nos cerveaux. De plus, ces visions des choses et des gens de ce monde nous proviennent, dans leur immense majorité, à travers ces miroirs déformants que sont les écrans, petits ou grands. Ainsi, avec le développement des nouvelles technologies de la communication, la distance entre nos imaginaires et la réalité se creuse de façon inexorable, et les comportements que ces imaginaires induisent sont de moins en moins compatibles avec les impératifs d’une vie sociale apaisée, de moins en moins compatibles aussi avec le débat, lui-même indispensable à la démocratie.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe déni du réel peut s’expliquer de différentes façons\u0026nbsp;; pour Nietzsche, (dans «\u0026nbsp;par delà le bien et le mal\u0026nbsp;»), l’orgueil l’emporte sur la mémoire\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;\u003cem\u003evoilà ce que j’ai fait dit ma mémoire\u0026nbsp;; je n’ai pu faire cela, dit mon orgueil qui reste inflexible, et finalement, c’est la mémoire qui cède\u003c/em\u003e\u0026nbsp;»\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003ePour Michel Onfray, il est un des traits de la décadence, du retour au cerveau reptilien pour beaucoup de nos comportements, du fait de la déficience du système éducatif et de la remise en cause de toutes les formes d’autorité.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa psychanalyse considère que le déni est un phénomène de défense produit par des conflits , des angoisses, des malaises auxquels le sujet ne peut faire face consciemment.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLes neurosciences montrent que la réalité n’est perçue que de façon parcellaire, et que sa construction implique la mobilisation de nos images mentales\u0026nbsp;; les réseaux sollicités dans le cerveau sont les mêmes, qu’il s’agisse de la réalité extérieure, ou de nos représentations. De ce fait nous ne pouvons rien percevoir sans en même temps construire du sens à ces perceptions. «\u0026nbsp;Au cinéma intérieur, nous sommes les auteurs du film que nous percevons. Nous sommes la caméra, nous sommes présents au montage, nous sommes le projecteur, nous sommes la salle, nous sommes les spectateurs\u0026nbsp;(\u003ca href=\"#_edn4\" id=\"_ednref4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e)\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eIl faut donc comprendre comment se construisent ces images mentales, comment s’élaborent nos imaginaires, qui se projettent ensuite sur la réalité\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eParfois la réalité alternative est volontairement produite par le pouvoir politique. On se souvient des «\u0026nbsp;villages Potemkine\u0026nbsp;», du nom du ministre (et amant) de Catherine II qui faisait construire des décors de villages et payait des figurants pour lui laisser croire que tout allait bien et que la Russie profonde était prospère…. Ces pratiques n’ont pas vraiment disparu avec l’URSS. Les étrangers y étaient accueillis dans des sites «\u0026nbsp;vitrines\u0026nbsp;», comme Stalino (aujourd’hui Donetsk), ou Arek, complexe de vacances situé sur la côte de la mer Noire, en Crimée. Aujourd’hui encore, on peut constater la distance qu’il y a entre les défilés de la place rouge,\u0026nbsp; les armes mirobolantes brandies par Poutine pour terroriser l’Occident, sous forme de maquettes et d’exemplaires, tel le char Armata ou le fameux missile Sarmate, et l’état de délabrement des forces russes en Ukraine.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn sait également les nombreuses ingérences russes dans les élections de pays démocratiques, comme le scandale de Cambridge Analytica en 2018, ou encore le ciblage par des pirates informatiques du parti d’Emmanuel Macron en 2017.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa Chine, de Mao Tsé Tung à Xi Jinping n’est pas en reste pour ce qui est des mises en scènes fallacieuses.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eNos démocraties ne sont pas exemptes de tentatives de manipulation de l’opinion. Des acteurs étrangers ont\u0026nbsp; été accusés d\u0026#8217;ingérence dans les élections en Allemagne, en Espagne et dans d\u0026#8217;autres pays européens. Selon enquête menée par un consortium de médias appelé Forbidden Stories, “Team Jorge\u0026nbsp;» est une entreprise israélienne utilisée pour des dizaines d’élections, notamment en Afrique.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eC’est en même temps souvent par la voie de la théorie, philosophique, historique ou sociale que se construisent les dénis de réalité.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eSans parler des religions, beaucoup de théories sont devenues des dogmes, considérant que la réalité empirique n’est qu’une fallacieuse et trompeuse trace d’une vérité qui se trouve précisément dans la doctrine..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eEn affirmant, dans le manifeste du parti communiste, que toute l’histoire était l’histoire de la lutte des classes, le marxisme imposait une grille d’analyse de toute la réalité économique et sociale. Les difficultés de l’école, la domination masculine, le retard du tiers monde, les mauvaises conditions de travail, etc tout s’expliquait par la domination de la bourgeoisie sur le prolétariat, et la nationalisation des moyens de production était \u0026nbsp;le remède universel.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans le sillage du marxisme se sont développées d’autres théories holistes, comme le structuralisme, avant qu’on n’en revienne à des analyses prenant mieux en compte la réalité empirique, (comme celles d’Alain Touraine qui vient de disparaître), ou tenant de l’individualisme méthodologique, comme celles de Raymond Boudon.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn peut se demander si on assiste par à un retour de l’idéologie et du dogmatisme avec la culture woke, quand un grand nombre de problèmes politiques et sociaux s’analysent à partir d’un principe unique\u0026nbsp;; comme aux temps du marxisme, le paradigme de la domination est la grille obligée\u0026nbsp;: le privilège blanc pour les relations avec les «\u0026nbsp;racisés\u0026nbsp;», le racisme systémique pour les violences policières, la domination masculine pour les problèmes des femmes, la domination des hétéros sur les LGBT+\u0026nbsp; en matière de discriminations sexuelles, et la persistance d’un colonialisme culturel pour expliquer par exemple les problèmes des banlieues.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe schéma est toujours le même\u0026nbsp;; la réalité empirique doit se conformer à la vérité, celle qui est dans la théorie, et elle pèse peu par rapport aux enjeux politiques ou universitaire qui amènent les acteurs à y jouer leur propre avenir.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa construction sociale de la réalité passe aujourd’hui, pour la plupart de nos contemporains, par de nouveaux moyens d’information et de communication, qui sont l’équivalent de ce qu’étaient les livres de chevalerie pour Don Quichotte.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eParfois de façon flagrante\u0026nbsp;; les «\u0026nbsp;bidonnages\u0026nbsp;» en matière de presse écrite, (certains sont avérés au Spiegel en 2018, et dans le New York Time), comme dans l’audio-visuel ne sont pas rares..(des images de la destruction du barrage ukrainien de Kakhovka, les 5 et 6 juin, relayées par \u0026nbsp;BFMTV et France 2 datent en fait de novembre 2022 ) De ce fait la confiance dans ces médias diminue et de plus en plus de personnes sont dans l’évitement de l’information (36% en 2023 contre 21% en 2017)\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eMais il faut surtout évoquer le temps énorme passé devant les séries\u0026nbsp;: 55 minutes par jour en moyenne pour les français (Selon une étude réalisée en 2019 par Médiamétrie)\u0026nbsp;; elles jouent un rôle énorme en matière de formation politique, et les personnages et épisodes en sont discutés, et font l’objet de prises de position et de disputes par les particuliers, et même dans certaines émissions, exactement au même titre que la réalité.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLes actualités dans la plupart des médias sont traitées sous l’angle du divertissement, et réciproquement, elles s’introduisent dans les émissions de variétés, brouillant encore la frontière entre la réalité et son double.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa confusion est telle que parfois des séries ont un effet sur le comportement d’hommes politiques\u0026nbsp;; ce fut le cas pour \u003cem\u003eGame of thrones\u003c/em\u003e qui a été utilisé par Pablo Iglesias, leader de Podemos, mais surtout, pour l’itinéraire politique stupéfiant de Zelinski, qui a reproduit très fidèlement dans la réalité ce qu’il avait d’abord produit en fiction («\u0026nbsp;serviteur du peuple\u0026nbsp;») pour parvenir au pouvoir en s’appuyant dessus..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eIl faut enfin mentionner l’emprise des jeux vidéos. En France il y a 58% de joueurs réguliers en 2021,\u003cbr\u003e\u0026nbsp;73% des Français jouent au moins occasionnellement, soit plus de 38 millions de personnes, le smartphone étant le support le plus plébiscité. Comme pour Don Quichotte, il s’agit bien d’un univers enchanté, échappatoire aux limites de la condition humaine, synergie de l’archaïsme et du développement technologique. Outre leur instrumentalisation pour certaines campagnes d’intérêt public, cela est devenu pour les jeunes le principal vecteur d’apprentissage de l’histoire. Énormément de jeux ont pour thème des grands moments de l’histoire, qui sont traités en fonction de leur intérêt marchand, plutôt que par souci de vérité historique. Les grandes batailles et les massacres font évidemment vendre mieux que les évolutions longues ou les négociations.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eReste évidemment le rôle des réseaux dans la formation des représentations\u0026nbsp;; tout a déjà été dit sur ce sujet (voir mon article sur les réseaux). Terreau favorable à la diffusion de l’idéologie de la Silicon Valley, à la propagation des fake news et des théories complotistes.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe bouquet final aurait dû être celui des métavers, qui au fond, cumulent toutes les caractéristiques des médias précédents. Certes, celui de Zuckerberg semble avoir fait long feu ; mais il serait prématuré d’y voir un échec définitif. Dans le cas d’un succès, c’est alors quasiment tout ce qui se fait dans la « vraie vie » qui pourrait prendre place dans cet univers virtuel. L’échec, au moins provisoire, de cette tentative est d’ailleurs explicable parce que précisément, on retrouve dans le métavers les mêmes vicissitudes que dans la réalité (par exemple des comportements violents, du harcèlement….). Preuve que ce qui est recherché est autre chose, une fuite de la réalité, un enchantement…\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa crise que nous traversons est certes économique, sociale, écologique, institutionnelle…mais elle est d’abord une crise de notre rapport à la réalité. Elle est d’abord une colonisation par les grandes puissances de nos\u0026nbsp; imaginaires. Il n’y aura pas de véritable changement de société si on ne trouve pas le moyen de les maîtriser. L’irruption de l’intelligence artificielle pourrait nous en donner les moyens, comme elle pourrait achever de nous couper de la réalité. C’est un enjeu politique considérable. Plutôt que de continuer à travestir la réalité, il importerait maintenant de la changer.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref1\" id=\"_edn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e les contradictions culturelles du capitalisme 1976\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref2\" id=\"_edn2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e la grande transformation 1944\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref3\" id=\"_edn3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e le réel et son double\u0026nbsp;; essai sur l’illusion Folio essais 1993\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref4\" id=\"_edn4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e «\u0026nbsp;le cinéma intérieur, projection privée au cœur de la conscience» Lionel Naccache Odile Jacob 2020\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDY5Nzg="}}}]}},"posts":[{"id":"cG9zdDoyMTk2","title":"Démasquer la violence mimétique : une tâche éducative","uri":"/2023/12/29/demasquer-la-violence-mimetique-une-tache-educative/","date":"2023-12-29T20:30:58","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"}]},"slug":"demasquer-la-violence-mimetique-une-tache-educative","content":"\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003e\u003cem\u003eL\u0026#8217;apport possible de la Théorie mimétique issue des écrits de René Girard pour l\u0026#8217;auto-analyse de la contagion émotionnelle et des mécanismes de la violence collective\u003c/em\u003e\u003c/strong\u003e\u003cstrong\u003e\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-large\"\u003e\u003cimg loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"699\" height=\"1024\" data-attachment-id=\"2198\" data-permalink=\"https://changement-de-cap.fr/2023/12/29/demasquer-la-violence-mimetique-une-tache-educative/perretgirard/\" data-orig-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?fit=1366%2C2000\u0026amp;ssl=1\" data-orig-size=\"1366,2000\" data-comments-opened=\"1\" data-image-meta=\"{\u0026quot;aperture\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;credit\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;camera\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;caption\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;created_timestamp\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;copyright\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;focal_length\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;iso\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;shutter_speed\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;title\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;orientation\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;}\" data-image-title=\"PerretGirard\" data-image-description=\"\" data-image-caption=\"\" data-medium-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?fit=205%2C300\u0026amp;ssl=1\" data-large-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?fit=699%2C1024\u0026amp;ssl=1\" src=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=699%2C1024\u0026#038;ssl=1\" alt=\"\" class=\"wp-image-2198\" srcset=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=699%2C1024\u0026amp;ssl=1 699w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=205%2C300\u0026amp;ssl=1 205w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=768%2C1124\u0026amp;ssl=1 768w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=1049%2C1536\u0026amp;ssl=1 1049w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?resize=1200%2C1757\u0026amp;ssl=1 1200w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/12/PerretGirard.jpg?w=1366\u0026amp;ssl=1 1366w\" sizes=\"(max-width: 699px) 100vw, 699px\" data-recalc-dims=\"1\" /\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eIl est à peine besoin de souligner la gravité permanente du problème de la violence et le caractère préoccupant de son apparente recrudescence au sein même de notre société. Il existe bien entendu différentes sortes de violence\u0026nbsp;: chacun peut être agressé par un inconnu, chez soi ou dans la rue, sans d\u0026#8217;autre motif que le vol ou, si l\u0026#8217;on est une femme, la prédation sexuelle. Toutefois, les phénomènes qui font de la violence un véritable problème de société, des violences urbaines aux phénomènes de harcèlement, s\u0026#8217;inscrivent souvent dans des dynamiques collectives et/ou relationnelles dans lesquelles la responsabilité d\u0026#8217;individus ordinaires \u0026#8211; potentiellement de tout un chacun \u0026#8211; est directement engagée. Il en est ainsi chaque fois qu\u0026#8217;entrent en jeu une situation de rivalité, de frustration sociale, un désir de revanche ou de vengeance, le besoin de faire supporter à autrui une situation de souffrance, ou encore le besoin d\u0026#8217;\u0026nbsp;«\u0026nbsp;expulser\u0026nbsp;» par le moyen d\u0026#8217;un bouc émissaire la violence latente au sein d\u0026#8217;un groupe traversé de multiples frustrations et rivalités.\u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eParmi d\u0026#8217;autres outils, la théorie mimétique issue des écrits de René Girard (1923-2015) pourrait être mobilisée pour développer et diffuser une intelligence concrète des mécanismes de la violence, particulièrement quand elle se manifeste au sein d\u0026#8217;un groupe ou qu\u0026#8217;elle est exercée collectivement par un groupe\u003ca href=\"#_ftn1\" id=\"_ftnref1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e. Précisons d\u0026#8217;emblée que l\u0026#8217;on ne trouvera rien de directement utile sur ce sujet dans les livres de René Girard. Il était trop pessimiste et «\u0026nbsp;apocalyptique\u0026nbsp;» \u0026#8211; persuadé que nos sociétés devront tôt ou tard choisir entre l\u0026#8217;auto-destruction violente et une conversion spirituelle radicale \u0026#8211; pour s\u0026#8217;intéresser aux applications possibles de ses idées dans un but d\u0026#8217;éducation et de transformation sociale. Mais rien n\u0026#8217;interdit de le faire à sa place, en s\u0026#8217;emparant de ses idées. L\u0026#8217;un des principaux mérites de la «\u0026nbsp;théorie mimétique\u0026nbsp;» dont il a posé les bases est d\u0026#8217;aider à prendre conscience du fait que la violence n\u0026#8217;est pas une anomalie, une pathologie accidentelle des relations humaines que l\u0026#8217;on pourrait expliquer et combattre en isolant et éradiquant ses causes sociales et psychopathologiques – frustrations causées par les inégalités, déficits de socialisation, perte de sens moral ou actions d\u0026#8217;individus particulièrement pervers. L\u0026#8217;approche mimétique conduit à un renversement de perspective\u0026nbsp;: elle oblige à reconnaître \u003cem\u003el\u0026#8217;instabilité fondamentale des relations humaines \u0026#8211; \u003c/em\u003ele fait que nous sommes tous, dans certaines circonstances, à risque de devenir persécuteurs, complices, ou bien-sûr victimes de la violence collective. Elle met en évidence\u003cem\u003e, \u003c/em\u003ele fait que notre dépendance psychique à autrui structure en profondeur nos désirs et nos affects. Cet autrui étant toujours susceptible de devenir pour nous un modèle (celui dont nous imitons les désirs), un obstacle (celui qui s\u0026#8217;oppose à la réalisation de ces désirs) ou un rival à abattre ou dominer. De là résulte, au sein des groupes humains sans structure répressive ou symbolique forte, un chaos relationnel et émotionnel qui peut à tout moment cristalliser en violence physique, psychologique ou symbolique. En résumé\u0026nbsp;: la violence n\u0026#8217;est pas seulement un problème qui existe en dehors de nous et auquel nous sommes parfois injustement confrontés, mais une réalité constitutive de la vie sociale dont nous sommes toujours plus ou moins partie prenante dès lors que nous sommes membres d\u0026#8217;un collectif, quel qu\u0026#8217;il soit.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn comprend mieux à partir de là comment s\u0026#8217;agencent et se complètent les différents moyens ordinairement mis en œuvre par les collectifs de toute nature pour gérer et contrôler leur propre violence. Ces moyens peuvent être vertueux ou franchement pathologiques, relever d\u0026#8217;une dynamique mimétique spontanée ou de dispositifs sociaux de contrôle ou d\u0026#8217;endiguement. Du côté des pratiques habituellement vertueuses de «\u0026nbsp;métabolisation\u0026nbsp;» des rivalités, on peut citer le sport, le jeu, toutes les activités génératrices de saine émulation et de coopération. Du côté du pathologique, on a soit la polarisation interne de la violence sur un souffre-douleur ou «\u0026nbsp;bouc émissaire\u0026nbsp;» (typiquement, le harcèlement), soit l\u0026#8217;externalisation dans la violence entre bandes (tous unis contre\u0026#8230;), entre groupes sociaux ou contre les symboles de l\u0026#8217;ordre social (y compris la police\u0026#8230;), sans oublier la guerre.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLes ressorts fondamentaux de cette mécanique sociale de la violence sont plutôt faciles à comprendre. Acquérir un minimum de culture et d\u0026#8217; « éléments de langage » à ce sujet ne serait déjà pas si mal. On peut en attendre une meilleurs capacité à repérer dans la vie de tous les jours la figure du bouc émissaire derrière celle de l\u0026#8217;individu harcelé, le souffre-douleur dont tout groupe a plus ou moins besoin pour se sentir exister pleinement. On peut en attendre aussi, pour les adultes, une conscience plus aiguisée du rôle de la contagion émotionnelle, du ressentiment, des pulsions vengeresses et de la facilité avec laquelle ces sentiments inévitables peuvent être instrumentalisés par des leaders cyniques. Dans une perspective éducative, on peut toutefois être plus ambitieux et réfléchir à des techniques plus actives de conscientisation et de transformation des comportements.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eAvant de voir quelles pratiques d\u0026#8217;éducation et de transformation sociale pourraient être imaginées dans cette perspective – principalement des mises en situation contrôlées permettant aux participants de s\u0026#8217;identifier aux différents «\u0026nbsp;rôles\u0026nbsp;» qu\u0026#8217;il sont susceptibles de tenir dans une situation de violence, voici en résumé les principaux messages dont il faudrait faciliter l\u0026#8217;assimilation\u0026nbsp;:\u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003col\u003e\n\u003cli\u003eLa rivalité est inhérente aux relations humaines, c\u0026#8217;est la conséquence de la nature mimétique de nos désirs et de nos émotions \u0026#8211; nous avons tendance à désirer ce que possèdent ou désirent les autres, à vouloir «\u0026nbsp;être comme eux\u0026nbsp;», à chercher à les dominer ou à avoir peur qu\u0026#8217;ils nous dominent d\u0026#8217;une manière ou d\u0026#8217;une autre.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa rivalité débouche souvent sur la violence, même si elle peut aussi s\u0026#8217;exprimer plus ou moins pacifiquement dans la compétition et l\u0026#8217;émulation (économique, sportive, scolaire, etc.)\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence est toujours potentiellement «\u0026nbsp;transitive\u0026nbsp;» et réciproque. Toute violence subie et ressentie appelle une réponse. Celle-ci peut être une rétorsion directe ou une vengeance différée, mais elle peut aussi consister à reporter la violence sur un tiers étranger au conflit.\u0026nbsp;\u0026nbsp;\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence est contagieuse. Le spectacle de la violence nous affecte et nous sommes toujours spontanément tentés de nous identifier à l\u0026#8217;un ou l\u0026#8217;autre camp (afin d\u0026#8217;être \u003cem\u003eunis contre\u003c/em\u003e\u0026#8230;).\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence latente au sein d\u0026#8217;un groupe tend spontanément vers la polarisation. L\u0026#8217;animosité diffuse «\u0026nbsp;coagule\u0026nbsp;» et se porte vers un individu particulier, un souffre-douleur ou «\u0026nbsp;bouc émissaire\u0026nbsp;»\u0026nbsp;: généralement une personne «\u0026nbsp;différente\u0026nbsp;», par son aspect physique, son orientation sexuelle, ses difficultés relationnelles, etc. Décharger sa violence sur un «\u0026nbsp;mouton noir\u0026nbsp;» ou sur un ennemi extérieur permet au groupe de conforter son unité en toute bonne conscience.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLa violence a le pouvoir de susciter sa propre «\u0026nbsp;mise en récit\u0026nbsp;». Pour René Girard, c\u0026#8217;est l\u0026#8217;essence des mythes d\u0026#8217;origine. Tout groupe a besoin d\u0026#8217;un récit fédérateur dans lequel la violence légitimée et la «\u0026nbsp;conscience victimaire\u0026nbsp;» (la conviction d\u0026#8217;appartenir à un collectif qui a été victime de violence ou menacé de l\u0026#8217;être) occupent toujours une grande place.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eL\u0026#8217;unanimité persécutrice peut facilement s\u0026#8217;inverser en compassion unanime à l\u0026#8217;égard d\u0026#8217;une victime. La contagion émotionnelle joue aussi bien en faveur de l\u0026#8217;unanimité compassionnelle que de la violence. On passe d\u0026#8217;ailleurs facilement de l\u0026#8217;un à l\u0026#8217;autre.\u0026nbsp;\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eIl est souvent possible, même pour un individu isolé, d\u0026#8217;agir concrètement pour désamorcer la violence (manifestation de solidarité à l\u0026#8217;égard du souffre-douleur, geste de réconciliation, appel au calme et à la raison\u0026#8230;). Il suffit parfois d\u0026#8217;un geste ou d\u0026#8217;une parole pour enrayer une spirale persécutrice (« que celui qui n\u0026#8217;a pas pêché lui jette la première pierre\u0026#8230; »). Cela suppose d\u0026#8217;être soi-même capable de décrypter la situation et de dominer ses propres passions. \u003c/li\u003e\n\u003c/ol\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eTout cela pourrait être largement développé et argumenté en s\u0026#8217;appuyant, notamment, sur les avancées récentes de la neuropsychologie – les «\u0026nbsp;neurones miroirs\u0026nbsp;». Mais aussi en faisant appel à la littérature, roman et théâtre. Les grands auteurs ont souvent décrit les passions humaines dans des termes qu\u0026#8217;éclaire très pédagogiquement la théorie mimétique (rivalités, contagion, escalade catastrophique de la violence, aveuglement auto-destructeur\u0026#8230;cf les tragiques grecs, les grands romanciers et Shakespeare\u0026#8230;). On peut aussi penser au cinéma, et plus largement aux documents audiovisuels (actualités, etc.).\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eL\u0026#8217;approche théorique, toutefois, suffit rarement pour transformer en profondeur les comportements. Pour susciter des prises de conscience et des transformations de comportement plus profondes, c\u0026#8217;est vers les techniques de la \u003cem\u003edynamique de groupe\u003c/em\u003e qu\u0026#8217;il faudrait se tourner. Il s\u0026#8217;agit d\u0026#8217;un vaste domaine de recherches et de pratiques d\u0026#8217;intervention, largement mobilisé à des fins de management d\u0026#8217;entreprise depuis la seconde guerre mondiale. Les techniques développées dans ce cadre – groupes d\u0026#8217;observation, jeux de rôles, etc. \u0026#8211; pourraient sans difficulté être utilisées à des fins d\u0026#8217;auto-analyse des phénomènes mimétiques et de la violence au sein d\u0026#8217;un groupe. Il «\u0026nbsp;suffirait\u0026nbsp;» pour cela de former suffisamment d\u0026#8217;enseignants et d\u0026#8217;animateurs capables de «\u0026nbsp;décrypter\u0026nbsp;» pour les participants les processus à l\u0026#8217; œuvre, à l\u0026#8217;aide d\u0026#8217;une grille d\u0026#8217;analyse inspirée de la théorie mimétique (sans exclure d\u0026#8217;autres apports).\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref1\" id=\"_ftn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e\u0026nbsp;\u0026nbsp;\u0026nbsp; Voir mon livre \u003cem\u003eViolence des dieux, violence de l\u0026#8217;homme. René Girard notre contemporain\u003c/em\u003e (Seuil 2023)\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDcwMTA="}}},{"id":"cG9zdDoyMTMz","title":"« C’est quoi la vie ?» à la lumière des sciences modernes","uri":"/2023/11/15/cest-quoi-la-vie-a-la-lumiere-des-sciences-modernes/","date":"2023-11-15T18:50:36","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"}]},"slug":"cest-quoi-la-vie-a-la-lumiere-des-sciences-modernes","content":"\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-full\"\u003e\u003cimg loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"324\" height=\"243\" data-attachment-id=\"2138\" data-permalink=\"https://changement-de-cap.fr/2023/11/15/cest-quoi-la-vie-a-la-lumiere-des-sciences-modernes/perrin-2/\" data-orig-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?fit=324%2C243\u0026amp;ssl=1\" data-orig-size=\"324,243\" data-comments-opened=\"1\" data-image-meta=\"{\u0026quot;aperture\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;credit\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;camera\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;caption\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;created_timestamp\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;copyright\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;focal_length\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;iso\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;shutter_speed\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;title\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;orientation\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;}\" data-image-title=\"Perrin\" data-image-description=\"\" data-image-caption=\"\" data-medium-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?fit=300%2C225\u0026amp;ssl=1\" data-large-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?fit=324%2C243\u0026amp;ssl=1\" src=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?resize=324%2C243\u0026#038;ssl=1\" alt=\"\" class=\"wp-image-2138\" srcset=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?w=324\u0026amp;ssl=1 324w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?resize=300%2C225\u0026amp;ssl=1 300w, https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/11/Perrin.jpg?resize=200%2C150\u0026amp;ssl=1 200w\" sizes=\"(max-width: 324px) 100vw, 324px\" data-recalc-dims=\"1\" /\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans l’article \u003cem\u003e\u003ca href=\"https://www.eccap.fr/article/du-sentiment-de-peur-au-desir-de-vivre\"\u003eDu sentiment de peur au désir de vivre\u003c/a\u003e\u003c/em\u003e, on concluait, à la lumière de Spinoza, que pour sortir de nos peurs (du changement climatique, de l’effondrement de la biodiversité, de la montée des discours haineux et des conflits armés, de la croissance des inégalités, des différentes formes de déclassement social,…), pour modifier en profondeur nos modes de vie, pour sortir de nos enfermements économique, culturel et politique, il nous fallait réanimer notre désir de vivre. On rappelait aussi que le désir de vivre, comme tout désir, mobilise la totalité de notre être (esprit et corps), c’est à dire nos capacités à la fois de raisonner et d’être en résonance par nos cinq sens avec nos milieux de vie matériel et immatériel (symbolique, imaginaire, culturel, spirituel, …). Plus fondamentalement, pour réanimer notre désir de vivre, il nous faut changer nos visions du monde et notre manière d’être au monde\u003csup data-fn=\"9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a\" id=\"9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a-link\"\u003e1\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Par rapport à cette quête existentielle, il est judicieux de remarquer que dans plusieurs disciplines scientifiques (biologie, astrophysique, neurosciences, anthropologie, éthologie,…) de nouveaux courants de pensée permettent d’apporter de nouvelles réponses au questionnement « c’est quoi vivre ? »\u003csup data-fn=\"82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1\" id=\"82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1-link\"\u003e2\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Ces nouvelles connaissances scientifiques nous offrent l’opportunité d’imaginer d’autres manières d’être au monde, d’être en résonance et de vibrer d’une manière plus intense avec nos différents milieux de vie, c’est-à-dire de réanimer notre désir de vivre.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eL’Univers est à l’intérieur de nous\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eÉveiller nos consciences à la magie de l’univers, c’est l’objectif que plusieurs astrophysiciens se sont donnés. On se souvient de la proposition d’Hubert Reeves : « nous sommes tous de la poussière d’étoiles ». Pour Trinh Xuan Thuan, « la cosmologie moderne a réenchanté le monde, en redécouvrant l’ancienne alliance entre l’homme et le cosmos ». Nos atomes d’hydrogène ont été fabriqués en moins de trois minutes, lors du big bang initial qui a eu lieu il y a 13,5 milliards d’années. Tous les autres atomes qui composent le corps humain, tels l’oxygène, le carbone, le calcium, le magnésium, etc.,  sont nés, soit de la fusion nucléaire au cœur des étoiles, soit dans les \u003cem\u003esupernovae\u003c/em\u003e, explosions géantes résultant de la mort des étoiles massives . « Ainsi, les étoiles sont nos lointains ancêtres et nous partageons tous la même généalogie cosmique. Nous sommes les frères des lions de savane et les cousins des coquelicots des champs »\u003csup data-fn=\"3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d\" id=\"3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d-link\"\u003e3\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eL’histoire de la vie est à l’intérieur de nous\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eJean François Dortier, fondateur de la revue \u003cem\u003eSciences Humaines\u003c/em\u003e et de la revue \u003cem\u003eHumanologue\u003c/em\u003e, en mobilisant les connaissances de l’astrophysique et de la biologie nous rappelle que : « Notre corps est composé de 65% d’eau. Cette eau vient des rivières, des lacs, des océans. Mais toute l’eau sur terre s’est formée aussi dans l’espace. Au fil du temps, c’est une pluie de météorites glacées qui ont formé les océans et les mers »\u003csup data-fn=\"92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1\" id=\"92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1-link\"\u003e4\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Et de rajouter : « La vie est née dans l’océan. Et pendant trois milliards d’années, elle y est restée. Puis les premiers organismes (des bactéries), des plantes, puis des animaux sont sortis des mers et ont colonisé la Terre. Nous autres, animaux terrestres, croyons avoir quitté notre océan primordial il y a bien longtemps. C’est faux. Nous restons des animaux marins. A la seule différence que nous transportons l’océan en nous ».\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eLa symbiose, principal processus d’innovation du monde vivant\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans son livre \u003cem\u003eJamais seul, ces microbes qui construisent les plantes, les animaux et les civilisations\u003c/em\u003e, le biologiste Marc André Selosse nous invite à découvrir que les symbioses microbiennes \u0026#8211; qui ont émergé tardivement dans la biologie moderne- «\u0026nbsp;envahissent aujourd’hui notre vision du vivant\u0026nbsp;». Cet ouvrage décrit comment les animaux (et donc les humains), mais aussi les plantes, sont intimement construits par les micro-organismes (des bactéries, des micro-champignons, des levures) qui les habitent, et les aident à accomplir des fonctions variées et souvent vitales.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa symbiose au sens large, c’est-à-dire vivre ensemble, est le principal processus d’innovation dans le monde vivant. Par exemple, la formation des cellules des plantes et des animaux (et donc les nôtres) qui constitue «\u0026nbsp;une découverte majeure de la biologie moderne\u0026nbsp;», est le résultat d’un processus de symbiose entre plusieurs bactéries qui sont devenues à l’intérieur de nos cellules des composants vitaux pour la respiration et la photosynthèse.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eVivre, \u0026nbsp;c’est inter-agir avec son milieu\u003c/strong\u003e\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eS’appuyant sur les connaissances de la biologie et des neurosciences, le philosophe et anthropologue François Flahaut\u003csup data-fn=\"d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d\" id=\"d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d-link\"\u003e5\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e propose de considérer l’écologie, comme une avancée scientifique qui consiste à penser le vivant avec ce qui le fait vivre, à penser l’organisme et  son biotope. Et de préciser : « Nous voyons bien que nous dépendons de la nourriture que nous mangeons, de l’air que nous respirons, l’alternance du jour et de la nuit : l’écologie physique ; il nous est cependant plus difficile de prendre conscience de l’écologie psychique dont nous dépendons. Pour passer de l’ontologie substantialiste\u003csup data-fn=\"0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358\" id=\"0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358-link\"\u003e6\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e à une ontologie relationnelle, il nous faut intégrer et assumer le fait que nous dépendons de toutes sortes d’aléas qui ne dépendent pas de nous. On croyait pouvoir maîtriser et voilà qu’il nous « faut faire avec »\u003csup data-fn=\"706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5\" id=\"706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5-link\"\u003e7\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. L’homme, en son activité psychique, est lui aussi soumis à la propension à vivre qui anime tous les vivants et aux contraintes de son environnement : « notre je est le fruit d’une symbiose complexe entre biologie, société et culture ». Il est urgent d’abandonner notre conception occidentale de l’individu :  un être autonome, auto-existant, indépendant. En concevant le sujet humain comme un être relationnel, qui déploie son désir d’exister en étant affecté par ce qui l’entoure. F. Flahault nous propose « une image nouvelle de ce que nous sommes ».\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa science moderne, la science en train de se faire, qui relève principalement de la raison, nous offre l’opportunité de construire de nouveaux imaginaires, de nouvelles images de ce que nous sommes, et de pouvoir ainsi augmenter notre capacité d’entrer en résonance avec nos différents milieux de vie. On rejoint ainsi par la science une caractéristique universelle des êtres humains que d’autres civilisations ont expérimenté par intuition, à partir de leurs relations symbiotiques avec le tout existant. Selon le philosophe camerounais Achille Mbembé « dans les systèmes africains de pensée, le propre du vivant était son indétermination, c’est-à-dire sa capacité de prolifération, de métamorphose permanente et de résonance avec tout l’existant ou encore les forces du cosmos »\u003csup data-fn=\"df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603\" class=\"fn\"\u003e\u003ca href=\"#df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603\" id=\"df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603-link\"\u003e8\u003c/a\u003e\u003c/sup\u003e. Dans son livre, \u003cem\u003eDevenir vivants\u003c/em\u003e, la philosophe Kodjo-Grandvaux nous avertit qu’il ne suffit pas de se représenter le monde, encore faut-il l’éprouver pour le connaître. « L’individu moderne rationnel, doit réapprendre à laisser parler son corps et ne plus être uniquement dans un rapport d’extériorité aux choses pour renouer avec l’émotion et l’intuition, cette intelligence qui comprend le monde ». Et de préciser, étymologiquement comprendre c’est « saisir ensemble », c’est en d’autres termes être en relation symbiotique, en résonance avec le tout existant.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\u003col class=\"wp-block-footnotes\"\u003e\u003cli id=\"9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a\"\u003eJacques Perrin, \u003cem\u003ePeut-on changer notre vision du monde ?\u003c/em\u003e Librinova, 2021. \u003ca href=\"#9c79bf45-24ae-4bb3-9076-3cad6f9a5c8a-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 1\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1\"\u003eOn ne traitera dans cet article que de quelques exemples. \u003ca href=\"#82a635fd-8a49-4771-accc-09c4906733e1-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 2\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d\"\u003eTrinh Xuan Thua, \u003cem\u003eFace à l’Univers, \u003c/em\u003eEditions Autrement, 2015. \u003ca href=\"#3a1dc765-4a56-44cd-b225-11e736f6aa7d-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 3\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1\"\u003eJean François Dortier, \u0026#8220;L’univers est en nous\u0026#8221;\u003cem\u003e, L’Humanologue\u003c/em\u003e, septembre 2021, pp. 95-96 \u003ca href=\"#92a27ddf-37d9-4796-8800-1c1947bbcca1-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 4\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d\"\u003eFrançois Flahault, \u003cem\u003eL’homme une espèce déboussolée, Anthropologie générale à l’âge de l’écologie,\u003c/em\u003e Fayard 2018. \u003ca href=\"#d2797cd5-c23a-4e4f-b17a-a6991c15711d-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 5\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358\"\u003eOntologie : philosophie de l’être, s’interroge sur qu’est-ce que l’être ? Descartes, avec sa version sécularisée de l’âme comme « substance » pensante, est l’un des plus grands représentants de l’ontologie classique. \u003ca href=\"#0e0dd259-6ddf-4186-aba0-b84a5c1e7358-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 6\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5\"\u003eFrançois Flahault, \u003cem\u003eop. cit.,\u003c/em\u003e p. 43. \u003ca href=\"#706bd841-d62e-46dd-ad03-d7f5aa2a29b5-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 7\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003cli id=\"df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603\"\u003eAchille Mbembe, \u0026#8220;Réinventer la démocratie à partir du vivant\u0026#8221;, \u003cem\u003eLe Monde\u003c/em\u003e, 13 août 2019. \u003ca href=\"#df188da1-6581-4e6f-97a2-434501c68603-link\" aria-label=\"Aller à la note de bas de page 8\"\u003e↩︎\u003c/a\u003e\u003c/li\u003e\u003c/ol\u003e\n\n\n\u003cp\u003e\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDY5NzM="}}},{"id":"cG9zdDoxOTcz","title":"Construire notre récit commun","uri":"/2023/07/02/construire-notre-recit-commun/","date":"2023-07-02T12:57:50","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"}]},"slug":"construire-notre-recit-commun","content":"\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-large\"\u003e\u003cimg decoding=\"async\" src=\"https://media.licdn.com/dms/image/D4E22AQFLv4iGzveYCg/feedshare-shrink_800/0/1684786946026?e=1691020800\u0026amp;v=beta\u0026amp;t=rFNGgJ7r9Ga8F2xF3Wn-cfkj7mNRsp0wjcmX1jGdDeI\" alt=\"\"/\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eA la suite de la proposition de plan d\u0026#8217;action de Bastien Sibille, visant à :\u003cbr\u003e\u0026#8211; nous relier (construire \u003cstrong\u003enotre récit commun\u003c/strong\u003e et de la confiance)\u003cbr\u003e\u0026#8211; nous renforcer (créer un fonds citoyen visant 1 milliard d\u0026#8217;euros)\u003cbr\u003e\u0026#8211; étendre notre capacité d\u0026#8217;action (Documenter, former, accompagner les initiatives naissantes ; Gagner en visibilité ; Préparer l\u0026#8217;extension du réseau). \u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eGuy Roustang a rédigé la note suivante pour contribuer à la réflexion sur le récit commun à construire. \u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eSelon Patrick Viveret, Laurent Berger posait la question : « Que ferions-nous si nous étions aux manettes ? » Pour répondre à cette question, il est essentiel de présenter un projet désirable et crédible qui permette de lutter contre les abstentions avec la menace de voir le Rassemblement National arriver au pouvoir après la politique néolibérale désespérante d’E.Macron\u003ca id=\"_ftnref1\" href=\"#_ftn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e. Un projet qui soit écologique, sociale et démocratique\u003ca id=\"_ftnref2\" href=\"#_ftn2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e et qui permette de satisfaire une grande partie de la population.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eProjet à diffuser chaleureusement avec le plaisir d’alimenter les combats des jeunes générations, de transmettre ce que nous savons. Tirer les leçons des échecs et ridiculiser les nantis qui utilisent les jets privés. Avoir une diversité d’argumentaires. Admirer l’intérêt du souci de la nature et des animaux, se rallier à de nouvelles façons de sentir (Descola et Mbembé) et respecter (voir le petit livre d’Agathe Cagé «\u0026nbsp;Respect\u0026nbsp;»). \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDenis Clerc devrait être fier d’avoir créé Alter Eco plutôt que de perdre espoir, et Alain Caillé fier du convivialisme au lieu de se désoler que «\u0026nbsp;rien ne marche\u0026nbsp;». Peut-être est-il temps de passer la main\u003ca href=\"#_ftn3\" id=\"_ftnref3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e, de considérer que c’est aux jeunes de reprendre le flambeau, qu’ils sont «\u0026nbsp;le monde de demain\u0026nbsp;».\u0026nbsp; \u0026nbsp;C’est ma façon d’interpréter ce que nous dit Dorothée Browayes\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;Il y a assez de jeunes générations engagées dans cette démarche pour les rejoindre, plutôt que de croire à un ralliement à nos idées !\u0026nbsp;»\u003ca href=\"#_ftn4\" id=\"_ftnref4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e. Intéressant de constater aussi que Bastien Sibille nous propose un «\u0026nbsp;plan d’action\u0026nbsp;» sans en rester au niveau des idées en espérant que nous pouvons faire confiance à son charisme d’entrepreneur. Le «\u0026nbsp;récit commun\u0026nbsp;» est la première étape de ce plan, dont nous ne pouvons pas savoir ce qu’il donnera. Comment s’organisera la réunion du 6 juillet aux Bernardins\u0026nbsp;? Je me le demande bien en notant par exemple que nous sommes 80 à nous être inscrits dans le projet de récit commun.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eNous ne nous mettons pas à la place des partis politiques\u003c/strong\u003e et ne prétendons pas agir à leur place mais il me semble que nous sommes en amont des luttes électorales, que nous préparons le terrain aux partis de gauche en agissant de telle façon qu’ils aient tout intérêt à s’inscrire dans ce que nous aurons préparé.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003cstrong\u003eAssurer la diffusion de ce que nous proposons\u003c/strong\u003e par de multiples canaux, notamment la Revue dessinée, éd. du Seuil, qui a créé des bandes dessinées sur «\u0026nbsp;Capital et Idéologie\u0026nbsp;» d’après le livre de T.Piketty, ou «\u0026nbsp;On leur vend des armes\u0026nbsp;»…et le pire c’est qu’ils s’en servent\u0026nbsp;». Pour diffuser largement notre récit commun, pourrait-on aboutir à un opuscule de quelques dizaines de pages\u0026nbsp;?\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eSur certains sujets, il devrait être possible d’intéresser des \u003cstrong\u003egens de bonne volonté\u003c/strong\u003e et de dépasser les oppositions gauche-droite.\u0026nbsp; Je pense par exemple à un rapport parlementaire signé par diverses tendances politiques qui avaient souligné la honte du sous équipement des services publics en Seine St Denis, de même un rapport de 4 sénatrices de divers partis qui dénoncaient la diffusion de la pornographie. Sur la régulation des Gafam gauche et droite ne pourraient-elles pas s’unir etc. etc.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eUne question importante selon moi\u0026nbsp;: Ne doit-on pas \u003cstrong\u003eenvisager des formations\u003c/strong\u003e\u0026nbsp;autour de nos propositions\u0026nbsp;? Des formations par l’université numérique\u0026nbsp;? Par les divers canaux d’éducation populaire\u0026nbsp;? \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eNe pas se contenter d’un public déjà acquis et surtout \u003cstrong\u003es’intéresser à ceux qui s’abstiennent\u003c/strong\u003e parce qu’ils ne croient plus que des politiques pourraient changer leur situation. D’où l’intérêt de textes comme ceux d’Ulysse Rabaté (La politique beurk,beurk) du Bondy blog ou des livres de Fatima Ouassak\u003ca href=\"#_ftn5\" id=\"_ftnref5\"\u003e[5]\u003c/a\u003e. \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eVoici quelques thèmes à privilégier (parmi beaucoup d’autres) que je me contente de lister pour l’instant\u003ca href=\"#_ftn6\" id=\"_ftnref6\"\u003e[6]\u003c/a\u003e, puisque je ne sais pas sous quelle forme sera rédigé le récit commun, 1\u003csup\u003eère\u003c/sup\u003e cible du Plan d’action de Bastien Sibille.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cul\u003e\n\u003cli\u003e\u0026nbsp;\u003cstrong\u003eRéchauffement climatique\u003c/strong\u003e voir les alliés du compte Carbonne individuel avec Pierre Calame.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eComment entendre ce que nous dit Fatima Ouassak\u003c/strong\u003e\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;l’écologie politique et électorale n’est pas du tout implantée dans les quartiers populaires\u0026nbsp;» bien plus «\u0026nbsp;le rapport de domination politique exercé par les classes moyennes supérieures blanches au nom de l’écologie risque de s’exacerber avec la crise climatique\u0026nbsp;» (pp. 80/81 de son livre «\u0026nbsp;Ecologie pirate\u0026nbsp;»)\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eFinancement de la politique\u003c/strong\u003e. Dans son livre «\u0026nbsp;Le prix de la démocratie\u0026nbsp;» Julia Cagé soutient, chiffres à l’appui, que l’argent a un rôle déterminant dans le résultat d’une élection. Pire : l’Etat subventionne davantage les orientations politiques des plus aisés, favorisant ainsi les partis de droite. Les plus pauvres paient pour satisfaire les préférences politiques des plus riches (voir son interview dans Libération reproduit dans ECCAP, auteur ECC). Des propositions remédiant à cette question «\u0026nbsp;oubliée\u0026nbsp;» s’impose absolument.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eAssurer l’indépendance des médias\u003c/strong\u003e aujourd’hui sous la coupe d’une dizaine de milliardaires.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003eLe manifeste fiscal, juste et féministe d’Oxfam du 9 décembre 2021 montrait \u003cstrong\u003ecomment\u003c/strong\u003e \u003cstrong\u003eune autre fiscalité permettrait de mieux financer les services publics\u003c/strong\u003e. Intéressant de noter au passage qu’Oxfam participe aussi bien au «\u0026nbsp;Pacte Pouvoir de vivre\u0026nbsp;» appuyé par la CFDT, qu’à «\u0026nbsp;Plus jamais ça\u0026nbsp;» soutenu par la CGT.\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003ePour éviter une société d’héritiers\u003c/strong\u003e, voir la note de France Stratégie de Clément Dherbicourt de janvier 2017. Parmi les suggestions\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;On peut imaginer par exemple que l’État verse un capital au dix-huitième anniversaire de tous les individus\u0026nbsp;»\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003e«\u0026nbsp;Pour rompre avec l’élitisme monarchique français\u003c/strong\u003e…élargir considérablement l’aire de recrutement de nos élites en mettant (réellement en synergie) les classes préparatoires, les grandes écoles et l’université\u0026nbsp;» Voir Alain Caillé\u0026nbsp;« Si j’étais candidat\u0026nbsp;» p.47\u003c/li\u003e\n\n\n\n\u003cli\u003e\u003cstrong\u003eEtc.\u003c/strong\u003e\u003c/li\u003e\n\u003c/ul\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref1\" id=\"_ftn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e Loin d’être le «\u0026nbsp;maître des horloges\u0026nbsp;», E.Macron est le garçon d’ascenseur qui fait monter Marine Le Peine aux étages supérieures.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref2\" id=\"_ftn2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e Plusieurs textes ont servi de base à la rédaction de cette note, citons plus particulièrement\u0026nbsp;: Paul Magnette\u0026nbsp;: La vie large\u0026nbsp;; F.Ruffin\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;Le temps d’apprendre à vivre\u0026nbsp;» Ed. Les liens qui libèrent, 2022\u0026nbsp;et\u0026nbsp;«\u0026nbsp;Je vous écris du front de la Somme\u0026nbsp;», même éditeur, 2022\u0026nbsp;; le Second manifeste des convivialistes\u0026nbsp;; A.Caillé «\u0026nbsp;Si j’étais candidat\u0026nbsp;» etc..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref3\" id=\"_ftn3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e Peut-être est-ce plus facile pour moi de «\u0026nbsp;passer la main\u0026nbsp;», moi qui suis d’une génération plus âgée que la plupart d’entre vous, par exemple qu’Hugues Sibille père de Bastien. Je peux reprendre ce que disait Véronique Decker directrice d’école pendant un quart de siècle en Seine St Denis : «\u0026nbsp;Si je m’interroge sur les résultats de nos luttes, le bilan est maigre. On n’a pas beaucoup avancé, mais ça m’a bien occupée ».\u0026nbsp; \u0026nbsp;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref4\" id=\"_ftn4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e Courriel de D.Browayes dans le débat des convivialistes le 13 juin 2023 à 16 h 39. Voir aussi «\u0026nbsp;Dialogue entre deux générations\u0026nbsp;» Ed. Les petits matins 2022 de Bastien Sibille et Hugues Sibille.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref5\" id=\"_ftn5\"\u003e[5]\u003c/a\u003e Fatima Ouassak a déjà écrit deux livres\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;La puissance des mères\u0026nbsp;» La Découverte 2020, «\u0026nbsp;Pour une écologie pirate-Et nous serons libres\u0026nbsp;» La Découverte 2023. Un troisième est annoncé qui traitera «\u0026nbsp;de l’organisation de la société\u0026nbsp;»\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ftnref6\" id=\"_ftn6\"\u003e[6]\u003c/a\u003e Alain Caillé parle de «\u0026nbsp;mesures basculantes\u0026nbsp;».\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDcwMjQ="}}},{"id":"cG9zdDoxOTUw","title":"La déréalisation du monde, ou le syndrome de Don Quichotte","uri":"/2023/06/15/la-derealisation-du-monde-ou-le-syndrome-de-don-quichotte/","date":"2023-06-15T09:44:49","categories":{"nodes":[{"name":"Enchanter nos mondes","slug":"enchanter-nos-mondes"},{"name":"Une démocratie pour vivre ensemble","slug":"une-democratie-pour-vivre-ensemble"}]},"slug":"la-derealisation-du-monde-ou-le-syndrome-de-don-quichotte","content":"\n\u003cfigure class=\"wp-block-image size-full\"\u003e\u003cimg loading=\"lazy\" decoding=\"async\" width=\"218\" height=\"231\" data-attachment-id=\"1951\" data-permalink=\"https://changement-de-cap.fr/2023/06/15/la-derealisation-du-monde-ou-le-syndrome-de-don-quichotte/donquichotte/\" data-orig-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?fit=218%2C231\u0026amp;ssl=1\" data-orig-size=\"218,231\" data-comments-opened=\"1\" data-image-meta=\"{\u0026quot;aperture\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;credit\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;camera\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;caption\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;created_timestamp\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;copyright\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;focal_length\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;iso\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;shutter_speed\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;,\u0026quot;title\u0026quot;:\u0026quot;\u0026quot;,\u0026quot;orientation\u0026quot;:\u0026quot;0\u0026quot;}\" data-image-title=\"donquichotte\" data-image-description=\"\" data-image-caption=\"\" data-medium-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?fit=218%2C231\u0026amp;ssl=1\" data-large-file=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?fit=218%2C231\u0026amp;ssl=1\" src=\"https://i0.wp.com/changement-de-cap.fr/wp-content/uploads/2023/06/donquichotte.png?resize=218%2C231\u0026#038;ssl=1\" alt=\"\" class=\"wp-image-1951\" data-recalc-dims=\"1\"/\u003e\u003c/figure\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa réalité, le présent, l’avenir surtout sont plus que sombres… Aux\u0026nbsp; angoisses métaphysiques éternelles (nous sommes des êtres mortels, limités, particuliers, etc) qui produisent depuis toujours, ainsi que le déplorait Pascal, une fuite vers le divertissement, s’ajoutent celles de l’époque.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe défi climatique, environnemental, la crise de l’énergie, les projets de psychopathes dangereux car puissants qui nous préparent l’humanité augmentée, les dangers de l’intelligence artificielle, tout cela se combine avec la marchandisation croissante de la société, et enfin l’orientation vers la généralisation de la société de surveillance sur le modèle chinois (le projet de loi sur les jeux olympiques de 2024 en France en offre des prémices). Est-il nécessaire de rappeler qu’à tout cela vient s’ajouter la guerre, et les risques croissants d’embrasement du monde..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eC’est pourtant bien dans la même galaxie que, lorsqu’on interroge nos contemporains en leur demandant s’ils sont heureux, et voient leur propre avenir avec optimisme, on obtient des chiffres impressionnants. Selon une enquête publiée en novembre 2021 par Elabe, l’Institut Montaigne en partenariat avec la SNCF et franceinfo, 78% des Français se déclarent heureux et 57% des Français envisagent leur avenir personnel avec optimisme\u003cstrong\u003e. \u003c/strong\u003eCes chiffres sont respectivement en hausse de cinq et dix points par rapport à l’année 2018.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eComment interpréter ce paradoxe, sinon par le fait que la plupart ne voient plus la réalité telle qu’elle est, mais telle qu’ils l’hallucinent\u0026nbsp;? Mais aussi que ces hallucinations sont – parfois volontairement –produites par le système capitaliste, et singulièrement par sa version néolibérale dans laquelle nous vivons.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDaniel Bell (\u003ca href=\"#_edn1\" id=\"_ednref1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e) avait déjà montré que le capitalisme produisait des comportements incompatibles avec les valeurs et croyances traditionnelles, et se retournait en quelque sorte contre la culture qui l’a engendré. Par exemple, l’épargne, une vertu traditionnelle («\u0026nbsp;la cigale et la fourmi\u0026nbsp;»\u0026nbsp;!) , entre en collision avec l’invention du crédit à la consommation, qui permet d’accéder à la\u0026nbsp; jouissance de l’objet, avant l’effort d’abstinence nécessaire pour se le procurer. Nous sommes à l’ère de la surconsommation.\u0026nbsp; D’ailleurs l’épargne n’est plus encouragée par les pouvoirs publics\u0026nbsp;; on constate au contraire la récurrente tentation de sanctionner fiscalement les gros épargnants.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003ePolanyi a montré (\u003ca href=\"#_edn2\" id=\"_ednref2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e) que l’encastrement de la société dans l’économie , caractéristique du capitalisme, conduisait à des catastrophes sociales.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eEn fait, les injonctions contradictoires sont permanentes\u0026nbsp;;\u0026nbsp; notamment entre les communications des pouvoirs publics, en matière de santé et d’énergie notamment, et la publicité. D’un côté le covoiturage, le vélo, les transports en commun, de l’autre des agences de tourisme invitant aux voyages lointains, et les constructeurs automobiles suggérant la puissance de leurs modèles… On pourrait multiplier les exemples.. Ce jeudi 25 mai encore, notre ministre Bruno Le Maire exaltait à Point-à-Pitre\u0026nbsp; l’extension du grand port maritime de la Guadeloupe\u0026nbsp; en stigmatisant la décroissance, et en incitant à développer les\u0026nbsp; transports. On oppose en chacun le consommateur et le citoyen\u0026nbsp;; notre société est devenue une machine à fabriquer de la schizophrénie.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn peut penser qu’on ne peut résoudre ces contradictions que par la fuite. Fuite dans les paradis artificiels ou le suicide, au pire, mais plus généralement fuite dans la fiction,\u0026nbsp; solution la plus facile pour échapper à la folie. Mais dans une fiction qui ne se présente pas comme telle, mais au contraire tient lieu de réalité. Il se fait qu’en plus, l’évolution de nos technologies facilite considérablement cette bascule mentale en dehors de la réalité. .\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eCharles Péguy avait pressenti cette propension à sortir de la réalité, en affirmant «\u0026nbsp;\u003cem\u003eIl faut toujours dire ce que l\u0026#8217;on voit. Surtout il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l\u0026#8217;on voit\u003c/em\u003e.\u0026#8221;\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans son ouvrage «\u0026nbsp;le réel et son double\u0026nbsp;», (\u003ca href=\"#_edn3\" id=\"_ednref3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e) Clément Rosset évoquait la possibilité de cette transposition radicale, avec quelques exemples littéraires à l’appui.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eMolière d’abord. . Le misanthrope voit bien que Célimène est une cocotte ; mais il est aveugle, il n’accorde pas ses actes à sa perception.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans la pièce «\u0026nbsp;Boubouroche\u0026nbsp;» de Courteline, le personnage portant ce nom surprend sa femme en flagrant délit d’adultère, mais refuse en quelque sorte d’admettre la situation, et accepte une explication invraisemblable de son épouse, détournant ensuite sa colère sur un voisin.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eProust, dans \u003cem\u003ela recherche\u003c/em\u003e, nous donne deux autres exemples\u0026nbsp;: Dans un amour de Swann\u003cstrong\u003e, \u003c/strong\u003eSwann donne de l’argent à Odett\u003cstrong\u003ee\u003c/strong\u003e, mais refuse de voir que c’est une femme entretenue ; il distingue la femme aimée et la femme payée. Plus loin dans la recherche, Saint-Loup, un ami du narrateur aime Rachel\u0026nbsp;; or celle-ci est une ancienne prostituée\u0026nbsp;; elle est un moment apostrophée par d’anciennes «\u0026nbsp;poules\u0026nbsp;» la connaissant\u0026nbsp;; Saint-Loup n’en tient aucun compte.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eMais le plus instructif reste Don Quichotte.. Don Quichotte s’est fabriqué une réalité alternative, comme on dit maintenant, en dévorant tous les livres de chevalerie de son époque. Puis il s’est lancé sur les routes, avec son écuyer Sancho Panza, en transposant toutes les visions de la réalité pour les intégrer à son univers mental.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eL’épisode des moulins à vent pris pour des géants à combattre est connu\u0026nbsp;; mais cela fonctionne en permanence\u0026nbsp;; une hôtellerie est vue comme un château, avec ses tourelles et ses chapiteaux, les filles perdues qui s’y trouvent sont de belles demoiselles. Dans la poussière, des troupeaux de moutons se transforment en armées, et le vin des outres transpercées devient le sang de géants terrassés. Mais c’est surtout la transformation d’une paysanne très ordinaire en Dulcinée «\u0026nbsp;plus haute Princesse de la terre\u0026nbsp;» qui est exemplaire. Jamais ce ne sont de pures hallucinations, mais il y a toujours un composé subtil d’éléments réels et de fabrication imaginaire. Et face aux évidences éventuelles se mettent en marche des processus de rationalisation qui permettent de persister dans l’irréel\u0026nbsp;: pour Don Quichotte, c’est l’enchanteur Frestron qui le persécute, et lui trouble les sens, en l’empêchant de voir la vérité, à savoir celle de son monde enchanté, de lui faire voir par exemple une pauvre paysanne à la place de Dulcinée..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDe tels personnages existent dans la réalité contemporaine. Liz Truzz, première ministre britannique pendant six semaines, annonçait le 20 octobre 2022 sa démission. Fascinée dès l’enfance par Margaret Thatcher\u0026nbsp;; petite fille âgée de sept ans, elle a joué le personnage de Margaret Thatcher dans une pièce de théâtre à l\u0026#8217;école. \u0026nbsp;Elle s’habille comme elle, se fait photographier dans les mêmes postures, très souvent. Ses déclarations, puis son programme sont calqués sur le modèle de son idole… mais en complet décalage avec son époque, son échec est cuisant.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe modèle s’applique aussi peut-être à Poutine, si on accepte l’hypothèse (crédible) qu’il est sincère. Son fantasme se construit à partir d’images de la grande Russie tsariste, et il se voit comme une réincarnation\u0026nbsp; de Pierre le Grand, et produit les catastrophes que l’on sait.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eAu-delà de phénomènes individuels que l’on pourrait qualifier de pathologiques, ce syndrome de Don Quichotte est quelque chose qui concerne en fait\u0026nbsp; la très grande majorité de nos contemporains. Sans aller, comme l’évêque Berkeley au XVIIIème siècle, jusqu’à douter de l’existence de la réalité matérielle, il faut prendre conscience que non seulement, le monde extérieur n’est perçu qu’à travers nos perceptions, mais aussi que ces perceptions sont en même temps – plus que des reconstructions \u0026#8211; des constructions de nos cerveaux. De plus, ces visions des choses et des gens de ce monde nous proviennent, dans leur immense majorité, à travers ces miroirs déformants que sont les écrans, petits ou grands. Ainsi, avec le développement des nouvelles technologies de la communication, la distance entre nos imaginaires et la réalité se creuse de façon inexorable, et les comportements que ces imaginaires induisent sont de moins en moins compatibles avec les impératifs d’une vie sociale apaisée, de moins en moins compatibles aussi avec le débat, lui-même indispensable à la démocratie.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe déni du réel peut s’expliquer de différentes façons\u0026nbsp;; pour Nietzsche, (dans «\u0026nbsp;par delà le bien et le mal\u0026nbsp;»), l’orgueil l’emporte sur la mémoire\u0026nbsp;: «\u0026nbsp;\u003cem\u003evoilà ce que j’ai fait dit ma mémoire\u0026nbsp;; je n’ai pu faire cela, dit mon orgueil qui reste inflexible, et finalement, c’est la mémoire qui cède\u003c/em\u003e\u0026nbsp;»\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003ePour Michel Onfray, il est un des traits de la décadence, du retour au cerveau reptilien pour beaucoup de nos comportements, du fait de la déficience du système éducatif et de la remise en cause de toutes les formes d’autorité.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa psychanalyse considère que le déni est un phénomène de défense produit par des conflits , des angoisses, des malaises auxquels le sujet ne peut faire face consciemment.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLes neurosciences montrent que la réalité n’est perçue que de façon parcellaire, et que sa construction implique la mobilisation de nos images mentales\u0026nbsp;; les réseaux sollicités dans le cerveau sont les mêmes, qu’il s’agisse de la réalité extérieure, ou de nos représentations. De ce fait nous ne pouvons rien percevoir sans en même temps construire du sens à ces perceptions. «\u0026nbsp;Au cinéma intérieur, nous sommes les auteurs du film que nous percevons. Nous sommes la caméra, nous sommes présents au montage, nous sommes le projecteur, nous sommes la salle, nous sommes les spectateurs\u0026nbsp;(\u003ca href=\"#_edn4\" id=\"_ednref4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e)\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eIl faut donc comprendre comment se construisent ces images mentales, comment s’élaborent nos imaginaires, qui se projettent ensuite sur la réalité\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eParfois la réalité alternative est volontairement produite par le pouvoir politique. On se souvient des «\u0026nbsp;villages Potemkine\u0026nbsp;», du nom du ministre (et amant) de Catherine II qui faisait construire des décors de villages et payait des figurants pour lui laisser croire que tout allait bien et que la Russie profonde était prospère…. Ces pratiques n’ont pas vraiment disparu avec l’URSS. Les étrangers y étaient accueillis dans des sites «\u0026nbsp;vitrines\u0026nbsp;», comme Stalino (aujourd’hui Donetsk), ou Arek, complexe de vacances situé sur la côte de la mer Noire, en Crimée. Aujourd’hui encore, on peut constater la distance qu’il y a entre les défilés de la place rouge,\u0026nbsp; les armes mirobolantes brandies par Poutine pour terroriser l’Occident, sous forme de maquettes et d’exemplaires, tel le char Armata ou le fameux missile Sarmate, et l’état de délabrement des forces russes en Ukraine.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn sait également les nombreuses ingérences russes dans les élections de pays démocratiques, comme le scandale de Cambridge Analytica en 2018, ou encore le ciblage par des pirates informatiques du parti d’Emmanuel Macron en 2017.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa Chine, de Mao Tsé Tung à Xi Jinping n’est pas en reste pour ce qui est des mises en scènes fallacieuses.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eNos démocraties ne sont pas exemptes de tentatives de manipulation de l’opinion. Des acteurs étrangers ont\u0026nbsp; été accusés d\u0026#8217;ingérence dans les élections en Allemagne, en Espagne et dans d\u0026#8217;autres pays européens. Selon enquête menée par un consortium de médias appelé Forbidden Stories, “Team Jorge\u0026nbsp;» est une entreprise israélienne utilisée pour des dizaines d’élections, notamment en Afrique.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eC’est en même temps souvent par la voie de la théorie, philosophique, historique ou sociale que se construisent les dénis de réalité.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eSans parler des religions, beaucoup de théories sont devenues des dogmes, considérant que la réalité empirique n’est qu’une fallacieuse et trompeuse trace d’une vérité qui se trouve précisément dans la doctrine..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eEn affirmant, dans le manifeste du parti communiste, que toute l’histoire était l’histoire de la lutte des classes, le marxisme imposait une grille d’analyse de toute la réalité économique et sociale. Les difficultés de l’école, la domination masculine, le retard du tiers monde, les mauvaises conditions de travail, etc tout s’expliquait par la domination de la bourgeoisie sur le prolétariat, et la nationalisation des moyens de production était \u0026nbsp;le remède universel.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eDans le sillage du marxisme se sont développées d’autres théories holistes, comme le structuralisme, avant qu’on n’en revienne à des analyses prenant mieux en compte la réalité empirique, (comme celles d’Alain Touraine qui vient de disparaître), ou tenant de l’individualisme méthodologique, comme celles de Raymond Boudon.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eOn peut se demander si on assiste par à un retour de l’idéologie et du dogmatisme avec la culture woke, quand un grand nombre de problèmes politiques et sociaux s’analysent à partir d’un principe unique\u0026nbsp;; comme aux temps du marxisme, le paradigme de la domination est la grille obligée\u0026nbsp;: le privilège blanc pour les relations avec les «\u0026nbsp;racisés\u0026nbsp;», le racisme systémique pour les violences policières, la domination masculine pour les problèmes des femmes, la domination des hétéros sur les LGBT+\u0026nbsp; en matière de discriminations sexuelles, et la persistance d’un colonialisme culturel pour expliquer par exemple les problèmes des banlieues.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe schéma est toujours le même\u0026nbsp;; la réalité empirique doit se conformer à la vérité, celle qui est dans la théorie, et elle pèse peu par rapport aux enjeux politiques ou universitaire qui amènent les acteurs à y jouer leur propre avenir.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa construction sociale de la réalité passe aujourd’hui, pour la plupart de nos contemporains, par de nouveaux moyens d’information et de communication, qui sont l’équivalent de ce qu’étaient les livres de chevalerie pour Don Quichotte.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eParfois de façon flagrante\u0026nbsp;; les «\u0026nbsp;bidonnages\u0026nbsp;» en matière de presse écrite, (certains sont avérés au Spiegel en 2018, et dans le New York Time), comme dans l’audio-visuel ne sont pas rares..(des images de la destruction du barrage ukrainien de Kakhovka, les 5 et 6 juin, relayées par \u0026nbsp;BFMTV et France 2 datent en fait de novembre 2022 ) De ce fait la confiance dans ces médias diminue et de plus en plus de personnes sont dans l’évitement de l’information (36% en 2023 contre 21% en 2017)\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eMais il faut surtout évoquer le temps énorme passé devant les séries\u0026nbsp;: 55 minutes par jour en moyenne pour les français (Selon une étude réalisée en 2019 par Médiamétrie)\u0026nbsp;; elles jouent un rôle énorme en matière de formation politique, et les personnages et épisodes en sont discutés, et font l’objet de prises de position et de disputes par les particuliers, et même dans certaines émissions, exactement au même titre que la réalité.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLes actualités dans la plupart des médias sont traitées sous l’angle du divertissement, et réciproquement, elles s’introduisent dans les émissions de variétés, brouillant encore la frontière entre la réalité et son double.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa confusion est telle que parfois des séries ont un effet sur le comportement d’hommes politiques\u0026nbsp;; ce fut le cas pour \u003cem\u003eGame of thrones\u003c/em\u003e qui a été utilisé par Pablo Iglesias, leader de Podemos, mais surtout, pour l’itinéraire politique stupéfiant de Zelinski, qui a reproduit très fidèlement dans la réalité ce qu’il avait d’abord produit en fiction («\u0026nbsp;serviteur du peuple\u0026nbsp;») pour parvenir au pouvoir en s’appuyant dessus..\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eIl faut enfin mentionner l’emprise des jeux vidéos. En France il y a 58% de joueurs réguliers en 2021,\u003cbr\u003e\u0026nbsp;73% des Français jouent au moins occasionnellement, soit plus de 38 millions de personnes, le smartphone étant le support le plus plébiscité. Comme pour Don Quichotte, il s’agit bien d’un univers enchanté, échappatoire aux limites de la condition humaine, synergie de l’archaïsme et du développement technologique. Outre leur instrumentalisation pour certaines campagnes d’intérêt public, cela est devenu pour les jeunes le principal vecteur d’apprentissage de l’histoire. Énormément de jeux ont pour thème des grands moments de l’histoire, qui sont traités en fonction de leur intérêt marchand, plutôt que par souci de vérité historique. Les grandes batailles et les massacres font évidemment vendre mieux que les évolutions longues ou les négociations.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eReste évidemment le rôle des réseaux dans la formation des représentations\u0026nbsp;; tout a déjà été dit sur ce sujet (voir mon article sur les réseaux). Terreau favorable à la diffusion de l’idéologie de la Silicon Valley, à la propagation des fake news et des théories complotistes.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLe bouquet final aurait dû être celui des métavers, qui au fond, cumulent toutes les caractéristiques des médias précédents. Certes, celui de Zuckerberg semble avoir fait long feu ; mais il serait prématuré d’y voir un échec définitif. Dans le cas d’un succès, c’est alors quasiment tout ce qui se fait dans la « vraie vie » qui pourrait prendre place dans cet univers virtuel. L’échec, au moins provisoire, de cette tentative est d’ailleurs explicable parce que précisément, on retrouve dans le métavers les mêmes vicissitudes que dans la réalité (par exemple des comportements violents, du harcèlement….). Preuve que ce qui est recherché est autre chose, une fuite de la réalité, un enchantement…\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003eLa crise que nous traversons est certes économique, sociale, écologique, institutionnelle…mais elle est d’abord une crise de notre rapport à la réalité. Elle est d’abord une colonisation par les grandes puissances de nos\u0026nbsp; imaginaires. Il n’y aura pas de véritable changement de société si on ne trouve pas le moyen de les maîtriser. L’irruption de l’intelligence artificielle pourrait nous en donner les moyens, comme elle pourrait achever de nous couper de la réalité. C’est un enjeu politique considérable. Plutôt que de continuer à travestir la réalité, il importerait maintenant de la changer.\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003chr class=\"wp-block-separator has-alpha-channel-opacity\"/\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref1\" id=\"_edn1\"\u003e[1]\u003c/a\u003e les contradictions culturelles du capitalisme 1976\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref2\" id=\"_edn2\"\u003e[2]\u003c/a\u003e la grande transformation 1944\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref3\" id=\"_edn3\"\u003e[3]\u003c/a\u003e le réel et son double\u0026nbsp;; essai sur l’illusion Folio essais 1993\u003c/p\u003e\n\n\n\n\u003cp\u003e\u003ca href=\"#_ednref4\" id=\"_edn4\"\u003e[4]\u003c/a\u003e «\u0026nbsp;le cinéma intérieur, projection privée au cœur de la conscience» Lionel Naccache Odile Jacob 2020\u003c/p\u003e\n","author":{"node":{"id":"dXNlcjoyMjA1MDY5Nzg="}}}],"slug":"enchanter-nos-mondes"},"__N_SSG":true},"page":"/categories/[slug]","query":{"slug":"enchanter-nos-mondes"},"buildId":"_sdH9ugd8IhVEv7MdJkXi","isFallback":false,"isExperimentalCompile":false,"gsp":true,"locale":"fr","locales":["fr"],"defaultLocale":"fr","scriptLoader":[]}