La vie large-manifeste écosocialiste

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Une lueur d’espoir. 
« La vie large – manifeste écosocialiste » est le titre d’un livre écrit par Paul Magnette, qui a été Ministre de l’Energie et du Climat au sein du gouvernement fédéral belge et ministre-président de la Wallonie ; et depuis 2019 Président du Parti socialiste belge. Ce livre remarquablement documenté et de lecture facile vient donc d’un professeur de théorie politique à l’Université libre de Bruxelles qui est aussi un homme politique. Autrement dit, un livre à lire si l’on veut reprendre espoir, avoir un projet politique crédible et ne pas être paralysé par l’analyse de la situation actuelle. Celle-ci est désespérante, puisque les accords de Paris en 2015 avaient retenu l’objectif de ne pas dépasser 1,5 °C d’augmentation des émanations carbone à la fin du siècle par rapport à l’ère préindustrielle. Alors que les engagements climatiques actuels des différents Etats du monde mettent notre planète sur une trajectoire de réchauffement catastrophique de 2,5°C. Cet été, avec les inondations, les incendies et la canicule, nous avons eu un avant-gout de ce que serait un avenir catastrophique, alors que nous en sommes seulement à une augmentation de 1,2°C par rapport à l’ère préindustrielle. 

On peut douter que la COP 27, réunie actuellement en Egypte, puisse dégager l’horizon. Sont présents plus de 6OO lobbyistes favorables aux énergies fossiles et en face les militants écologistes pèsent bien peu. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Gutterez a été clair, l’humanité a un choix : soit un pacte de solidarité climatique, soit un pacte de suicide collectif. 

Pour un compte carbone

« Les 10% les plus riches de la population mondiale sont responsables à eux seuls de près de la moitié des émissions (de gaz à effet de serre), alors que la moitié la plus pauvre de l’humanité ne produit que 12% des émissions globales ». Quant à une toute petite minorité de 1%, elle émet à elle seule plus de carbone que la moitié la plus pauvre du monde. Et en France le 1% le plus riche émet quarante fois plus que les 10% les plus pauvres. Il n’y aura pas de lutte contre le réchauffement climatique sans lutte contre les inégalités. 

Pour répondre au défi climatique, Pierre Calame nous a envoyé le message suivant : « Avec les alliés, de plus en plus nombreux de « compte carbone », https://comptecarbone.cc/, nous sommes arrivés à la conviction que seule l’allocation à tous d’un quota égal d’émissions annuelles de gaz à effet de serre répondait au défi climatique ». Pour que chacun comprenne ce dont il s’agit, nous reproduisons son texte : « A question radicale, solution radicale »[1]
« Nous ne sommes pas des ascètes. Il nous faut la vie large ».
C’est cette citation de Jean Jaurès que Paul Magnette met en exergue de son livre. Il écrit notamment : « Soumettre la sphère de la production et de la consommation à la délibération démocratique, n’est-ce pas la manière de se poser enfin les questions trop longtemps éludées, « que produire et comment produire » pour répondre aux besoins humains[2], tout en respectant les limites physiologiques des humains et les limites de notre environnement naturel ?[3]». Pour nous inciter à consommer toujours davantage les moyens sont énormes : « aux Etats-Unis, le budget annuel alloué par les entreprises à la publicité commerciale équivaut au double des dépenses d’enseignement »[4]

Au contraire, « Il nous faut la vie large ! Toute perspective de transition climatique devrait démontrer que le monde à venir améliorera le bien-être et le plaisir d’une immense majorité de la population. Plutôt que de faire le portrait des cercles de l’enfer où nous plongera le réchauffement climatique, il faut dépeindre…les plaisirs et la beauté d’un monde sans carbone, un monde apaisé, où l’insécurité de l’existence recule sans cesse, où chacun accède à la santé, à l’éducation, à une alimentation et un logement sains, où la jouissance de la nature n’est plus un privilège… »[5]

A condition de mener une autre politique, il s’agit de convaincre une partie de la population tentée aujourd’hui par un repli identitaire mortifère qu’un autre avenir est possible avec la « vie large ». Paul Magnette pour ouvrir le dialogue fait quelques propositions. L’ECCAP, avec d’autres, s’engage dans les mois à venir à ouvrir des débats sur ce que pourrait être une autre politique.  
 

[1] Voir dans l’ECCAP, Pierre Calame : A question radicale, solution radicale.
[2] Questions souvent posées par différents articles de l’ECCAP : voir par exemple Guy Roustang : Esquisse sur les besoins.
[3] P.188 du livre. Nous recommandons vivement également l’interview de Paul Magnette à France Inter le 11 octobre 2022.
[4] P. 78 du livre. Dans un article du Monde des 6/7 nov. 2022, intitulé « Régulons enfin la publicité » un économiste et un politiste écrivent : « Alors qu’Emmanuel Macron annonce « la fin de l’abondance », les quelque 34 milliards d’euros de dépenses annuelles en publicité et marketing promotionnel – un montant comparable à l’effort des entreprises françaises en matière de recherche et développement – continuent de doper des modèles économiques fondés sur la surconsommation et incompatibles avec les limites planétaires ».
[5] P. 256