[1] Voir dans google « Seuil critique dans Science du 8 septembre » et Le Monde du 10 septembre, page 11.
[2] France Inter, 6 septembre.
[3] Page 25 de « Je vous écris du front de la Somme ». Voir in Le Monde,13 sept. 2022, p.14 « la sortie du Secrétaire National du PCF sur « la gauche des travailleurs » face « à la gauche des allocations et des minima sociaux » aura alimenté les débats entre les membres de la Nupes tout le w.e. à la fête de l’Humanité. Preuve que ce débat pas toujours très clair est d’actualité !
[4] « L’impact environnemental des jets privés est largement sous- In Le Monde,13 sept. 2022, p.34 « la sortie du Secrétaire National du PCF sur « la gauche des travailleurs » face « à la gauche des allocations et des minima sociaux » aura alimenté tout le w.e. à la fête de l’humanité estimé ».
15/09/2022
Forces et faiblesses d’un renouveau nécessaire
ClimatDémocratie
C’étaient les derniers mots de notre lettre d‘avant les vacances. Depuis, La canicule de l’été a apporté son lot de désastres en France et dans le monde : sécheresse et feux de forêt, inondations…Espérons que maintenant la prise de conscience des dangers que nous fait courir le changement climatique est bien devenue générale. D’autant plus que les mauvaises nouvelles s’accumulent. Tout récemment une équipe internationale de chercheurs a souligné que même au niveau actuel de réchauffement (+ 1,1° C par rapport à l’ère préindustrielle), le monde risque de passer certains points de basculement. Un “point de basculement” est “un seuil critique au-delà duquel un système se réorganise, souvent brutalement et/ou de manière irréversible”. Selon la définition du Groupe d’experts climat de l’ONU (GIEC), ce sont des phénomènes « qui déclenchent de manière indépendante et inéluctable d’autres conséquences en cascade »[1]. Cinq points de basculement seraient déjà probables, par exemple la disparition des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique de l’Ouest.
Indépendamment du réchauffement climatique, un renouveau de notre démocratie s’impose compte tenu des menaces que fait peser la montée du Rassemblement National de Marine Le Pen. Ses progrès entre les élections présidentielles de 2017 et 2022 sont spectaculaires et les 89 députés du Rassemblement National à l’Assemblée lui permettent un ancrage dans les territoires. La question est sérieuse : Marine Le Pen ne risque-t-elle pas de l’emporter en 2029 ? Bien des départements qui votaient majoritairement pour les partis socialistes ou communistes votent maintenant pour le Rassemblement national. C’est ce que rappelait Léa Salamé à France Inter[2] en invitant François Ruffin pour son dernier livre « Je vous écris du Front de la Somme ». Celui-ci écrit : « Le front de la Somme a craqué ». Bien sûr, F.Ruffin est fier d’avoir fait exception : « Et de toute la France, je suis l’insoumis qui relève le mieux le score de la gauche, médaille d’or toutes catégories, +11% comparées aux présidentielles ». Ruffin précise bien qu’il doit ce succès à une « campagne de feu et de fou » et sa crainte c’est que la gauche ne soit pas convaincue de la nécessité de reconquérir ceux qui votent Rassemblement National et qui sont « fâchés » mais pas « fachos ». Il en veut au think-tank Terra nova qui conseillait au parti socialiste à l’automne 2011 une stratégie centrée sur les valeurs avec « 1.les diplômés. 2.les jeunes.3.les minorités » en laissant les ouvriers au Front National. [3]
Dans la mesure où les hommes et les femmes soucieux d’égalité sont nombreux parmi les électeurs du Rassemblement National, alors que le RN n’en parle jamais, il y a selon Ruffin « une faille où nous pouvons nous engouffrer ». Même si aujourd’hui les inégalités sont moins apparentes qu’autrefois : lorsque les ouvriers sortaient de l’usine, ils voyaient les châteaux des riches, alors qu’aujourd’hui les propriétés de B.Arnault sont loin, à Courchevel ou à New-York… Avec le débat sur les jets privés la question des inégalités est venue sur le devant de la scène avec le constat qu’ils aggravent les émissions de CO2. Ceux qui ne la prennent pas au sérieux ont beau jeu de répondre que ces émissions sont négligeables puisque de l’ordre de 0,1 % des émissions totales. Mais comme le rappellent des chercheurs, les humains coopèrent à condition que les autres coopèrent. « Si certains sont autorisés à émettre dix fois plus de carbone pour des raisons de confort, alors pourquoi limiter sa consommation de viande, baisser la température de son thermostat ou limiter les achats de produits neufs ». [4] La question des inégalités tellement occultée par notre Président devrait être mise sur le devant de la scène, d’autant plus qu’elle est renouvelée par la prise en compte du changement climatique. En effet comme le rappelle Oxfam France : « 50% des émissions de CO2 sont produites par les 10% les plus riches de la planète, tandis que la moitié la plus pauvre de la population n’en émet que 10% ».
Le Conseil national de la refondation, initié par notre Président, qui s’est réuni le jeudi 8 septembre, permettra-t-il le dialogue entre personnes qui ne se parlent jamais comme l’Association des maires de France, la FNSEA , ou la Fondation Abbé Pierre ? Certains pourront être sceptiques, douchés par les médiocres résultats du grand débat national qui a suivi le mouvement des gilets jaunes ou par ceux de la Convention Citoyenne pour le Climat. Sur les 52 personnes invitées, 40 étaient présentes et en sont ressorties avec des avis mitigés. Laurent Berger, Secrétaire Général de la CFDT aurait dit : « C’était utile, exigeant, agaçant parfois, parce qu’on n’est pas d’accord. Mais mine de rien, ça a avancé ».
On peut imaginer qu’E.Macron n’est plus du tout dans l’attitude triomphante qui a été la sienne en arrivant au pouvoir en 2017. Il n’a plus de majorité « godillot » à l’Assemblée, il ne pourra pas se présenter une troisième fois, il sait que plusieurs piaffent déjà de prendre sa place ; rêvons alors qu’il veuille laisser le souvenir du rassembleur, loin de l’image de Président des riches qui lui colle à la peau pour de bonnes raisons.
Toujours est-il que l’ECCAP, pour sa très modeste part, va s’efforcer de donner la parole et de faire dialoguer tous ceux qui sont conscients de la nécessité de changer radicalement de cap. C’est à une nouvelle étape plus collaborative que nous voulons inviter ceux qui nous suivent et ceux qui ne nous connaissent pas encore et qui voudront bien inventer la gouvernance d’un outil numérique au service du changement radical qui s’impose au service de tous.
Guy Roustang