Discrimination

Toutes catégoriesVivre ensemble

 Discrimination. NOUS SOMMES TOUS CONCERNES !

 

Durant combien de temps, au bout de combien de générations restera-t-on un immigré alors que l’on est né en France,  français et rien d’autre que français ? « François DUBET Ce qui nous unit (La république des idées Le Seuil) »

La peur après la stupeur

Il y a bientôt deux ans, l’attentat contre les journalistes de Charlie Hebdo nous avait rempli de stupeur. Les grandes manifestations qui ont suivi ces jours d’horreur avaient semblé rassembler la grande majorité des hommes et des femmes de toutes croyances et de toutes origines autour du slogan “je suis Charlie“ qui semblait s’imposer comme une évidence. Nous en avions immédiatement pressenti les limites et les quelques réactions hostiles auraient cependant dû nous alerter. Elles provenaient essentiellement de jeunes ou moins jeunes originaires des quartiers populaires et de quelques intellectuels rapidement condamnés au silence. A Marseille, la présence réduite des habitants des “Quartiers Nord“ à l’une ou l’autre des deux manifestations été perçue par certains comme une forme de rupture de l’unité nationale face au défi du terrorisme. Certains se sont vus parfois sommés de prendre parti pour la liberté d’expression au nom des valeurs républicaines.

 

Depuis ce 7 janvier 2015, dans le monde entier et plus spécialement en France, des individus, aveuglés par une idéologie barbare et souvent manipulés par des prêcheurs de haine, poursuivent leurs sinistres missions en semant la douleur et la peur.

 

EUX et NOUS : une nouvelle et dramatique fracture ?

 

Cette longue séquence de menaces et d’attentats et ses résultats sur notre vie quotidienne nous ont fait oublier les conséquences directes sur la vie de certains de nos concitoyens qui en fonction de leur origine, de leur culture ou de leurs croyances supposées sont depuis considérés avec méfiance sinon avec hostilité s’ils ne manifestent pas le même unanimisme.

 

A Marseille nous en connaissons beaucoup qui sont souvent nos amis. Nous les rencontrons au travail, dans les associations ou tout simplement dans la rue. Ils sont Français, Marseillais, le plus souvent né en France de parents originaires du Maghreb ou d’Afrique. Pour la plupart ils ont fait des études, ont un métier, une famille, certains sont au chômage ; Ils militent dans les associations les partis politiques, les syndicats qui se revendiquent de la laïcité. Bref rien ne les distingue des autres marseillais hormis leur patronyme. Ils pourraient incarner ce qu’il est convenu d’appeler “l’intégration à la française“, mais subissent et témoignent des discriminations, des relégations, des inégalités, du racisme, de la xénophobie…

 

L’épisode “je suis Charlie“ et les dramatiques évènements qui ont suivi demeurent pour beaucoup d’entre eux un douloureux traumatisme. Parce que leur histoire et leur nom les désignent comme appartenant à la communauté musulmane, ils sont invités par tous moyens, à se démarquer des dérives attribuées à cette religion et à faire la preuve de leur adhésion “aux valeurs majoritaires“. Certains ont choisi de se taire et de ne pas céder à l’impératif qui leur est imposé, d’autres s’interrogent avec amertume sur l’échec de leurs efforts pour apparaître comme des citoyens ordinaires, d’autres enfin tentent de s’organiser et, assumant l’étiquette “d’indigène“ à laquelle ils sont soumis, s’engagent dans une démarche politique mettant en cause une France qui n’a pas rompu avec son identité coloniale. Ces alternatives, et d’autres, conduisent peu ou prou à distendre sinon à couper les liens d’amitiés et de solidarité  établis de longue date à travers des combats communs entre les Marseillais qui défendent les mêmes droits pour tous, et notamment  le “droit à la différence“  et à la liberté de pensée de conscience et de religion telle que définie dans l’article 18 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.

 

 Marseille, ville cosmopolite ne saurait se satisfaire d’une nouvelle fracture qui s’ajouterait aux fractures sociales et géographiques largement dénoncées par ailleurs. On dit que Marseille compterait plus 250 000 musulmans (les Marseillais Musulmans. in Open Society 2010) soit près du tiers de la population. Ce chiffre, confirmé par les services de la mairie, est cependant largement contesté par les intéressés eux-mêmes. Mais qu’importe. Le nombre de salles de prières plus ou moins clandestines comme les tenues visibles partout en ville attestent du poids grandissant de cette religion. Nulle doute cependant qu’un tel chiffre ne saurait représenter une pratique religieuse régulière ni même une appartenance à une communauté homogène. C’est pourtant en s’appuyant sur ces apparences trompeuses que des apprentis sorciers soufflent sur les braises. Ils n’hésitent pas à pratiquer des raccourcis dangereux laissant croire qu’un musulman peut représente un danger potentiel  dont il convient de surveiller les comportements. La séquence : musulman-arabe-délinquant-islamiste-terroriste peut être ainsi vite assimilée par des esprits apeurés et facilement endoctrinés.

 

A Marseille et dans la région, ces incendiaires trop nombreux ne se réduisent pas aux représentants de l’extrême droite, mais recouvre un large éventail de politiques comme l’a montré durant l’été la grotesque polémique concernant le Burkini. Certaines décisions, certains discours ont, dans le contexte actuel, des conséquences imprévisibles et mettent en cause le nécessaire vivre ensemble. Face à la menace que nous avons décrite et que se rapproche, il convient de mobiliser tous les citoyens marseillais qui refusent ce scénario mortel de la division. Chacun doit, à sa manière, s’engager à renouer cet indispensable  dialogue avec tous ceux qui peuvent se sentir stigmatisés et rejetés de la communauté marseillaise.

 

Engageons nous à multiplier les occasions d’un dialogue permettant à tous ceux qui le souhaitent d‘exprimer leur espoir d’une société fraternelle et respectueuse de l’autre.

 

Alain FOUREST

alaian.fourest@wanadoo.fr

Marseille le 10 novembre 2016

 

En complément de ce texte d’A.Fourest, voici un exemple donné à la télévision par Arnaud Montebourg, candidat à la primaire socialiste : Un chercheur d’emploi avec un nom arabe a envoyé son C.V. en une centaine d’exemplaires. Il n’a pas eu une seule proposition. Il a alors décidé de changer simplement son nom et a envoyé son C.V. à cinq adresses. Il a alors reçu 2 propositions d’entretien.