Un exemple de concertation entre professionnels et bénévoles : La Maison de l’Hospitalité

Migrations
Contexte et histoire de la création de la Maison de l’Hospitalité de Martigues
 
La création de l’association « Maison de l’Hospitalité » en 2020 est le résultat d’une longue histoire des solidarités et d’engagements citoyens sur le territoire de Martigues et les communes limitrophes. Elle s’enracine dans les valeurs de fraternité et la richesse d’un tissu associatif qui a toujours été un des ferments de la cohésion sociale, un lieu de formation et d’émancipation et un terreau d’initiatives locales.
 
            1° le temps de la reconnaissance mutuelle
Depuis de nombreuses années, plusieurs mouvements, organisations et associations locales du territoire de Martigues et des communes limitrophes ont appris à se connaître, à se respecter et à travailler ensemble sur des projets communs. Par-delà leurs identités laïques ou confessionnelles et à l’occasion de l’anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, chaque année, elles ont organisé des évènements communs témoignant ainsi de leur volonté d’inscrire leurs actions spécifiques dans la perspective de défendre la dignité de tout être humain et de lutter contre toutes les formes de discriminations.
 
            2° le temps d’une expérimentation solidaire et efficace
 En 2014, une dizaine de ces associations, avec d’autres organisations et des citoyens, a créé un collectif pour accompagner, soutenir et intégrer plusieurs familles Roms qui avaient squatté une maison inoccupée. Ce collectif, par la manière qu’il a eu de fonctionner, l’esprit qui a présidé à ses actions et sa volonté de faire participer ces familles à la mise en œuvre de leur intégration, a été reconnu comme partenaire par le Sous-Préfet d’Istres à cette époque. En imposant ces associations comme des interlocuteurs responsables dans les discussions avec les bailleurs sociaux, les institutions sociales, cette collaboration a abouti à l’attribution de plusieurs logements sociaux et à des parcours de formation en partenariat avec l’AFPA d’Istres et le chantier d’insertion Graines de Soleil. Cette expérience a permis à tous les acteurs associatifs de se rendre compte qu’une action citoyenne responsable, en partenariat avec les autorités et institutions locales, pouvait aboutir à des réussites en matière d’intégration sociale.
 
            3° l’émergence des questions liées au droit des étrangers et à l’accompagnement des exilés, demandeurs d’asile et sans-papiers
 
Il existe sur le territoire de Martigues un foyer ADOMA HUDA d’une capacité de 188 chambres. Y sont hébergés aussi bien des demandeurs d’asile, souvent en famille, que des chibanis. La présence de nombreux demandeurs d’asile, de déboutés, de sans-papiers et les demandes d’aide de leur part ont interpellé les mêmes forces militantes. Et c’est ainsi que plusieurs associations caritatives, humanitaires et citoyennes du territoire de Martigues ont créé un collectif de soutien aux migrants en 2018. Et tous ces mouvements œuvrent ensemble auprès de ces populations. Ce travail en commun s’est développé par l’intermédiaire du Réseau Education Sans Frontières, de l’A.C.A.T., de l’A.S.T.I., du CCFD- Terre Solidaire, de la M.J.C de Martigues, des sections locales de la L.D.H. de Martigues et d’Istres, du groupe local d’Amnesty International, du Mouvement de la Paix et du Café associatif Le Rallumeur d’Etoiles, avec le soutien d’autres organisations.
De plus, d’autres associations et initiatives ont vu le jour comme le réseau Welcome sur Martigues, qui, depuis sa mise en place, a accueilli plusieurs demandeurs d’asile.
Tout au long de ces expériences, les associations et organisations ont développé des partenariats entre elles et ont peu à peu été reconnues comme des acteurs à part entière par des autorités territoriales, et des institutions concernées.
Il faut aussi rappeler l’organisation de l’accueil de la marche nationale des migrants que plusieurs de ces associations ont organisé à Martigues avec une soirée en partenariat avec SOS Méditerranée en 2018.
 
            4° la création d’un groupe de travail et de coordination entre les associatifs et les professionnels de l’accueil et de l’accompagnement des populations étrangères (Septembre 2019)
 A l’initiative de la MJC et avec l’appui de plusieurs organisations comme la section locale de la Ligue des Droits de l’Homme, un groupe de travail et de coordination a été mis en place en 2019. 
 En effet, face à toutes ces initiatives, il devenait important de mettre en place un espace de rencontres entre les associations et les institutions qui interviennent à un moment ou à un autre dans le parcours des personnes exilées sur le territoire de Martigues. Ces réunions ont permis de recenser l’existant, de se rencontrer et d’identifier qui faisait quoi, afin d’affiner les rôles et possibilités de chacun ; de développer les prises de contact ; de créer des synergies entre les professionnels et les bénévoles, d’échanger et de se coordonner sur des cas précis, de repérer les besoins ; plus largement d’instaurer un climat de partenariat pour mettre en œuvre l’esprit et les objectifs de l’ANVITA (Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants) à laquelle la Ville de Martigues a adhéré en 2019.
 
Composition du groupe de travail
 – associations : A.C.A.T., A.S.T.I., Amnesty International, MJC de Martigues, Ligue des Droits de l’Homme de Martigues et d’Istres, Mouvement de la Paix, Collectif le Pont, Association des Guinéens du Sud de la France, Café Associatif Le Rallumeurs d’Etoiles
 
 – organismes et institutions ; le foyer ADOMA-HUDA, l’ADDAP13, le CIO, Pôle Emploi, la Maison de la Solidarité, le Centre Intercommunal d’Action Sociale de Martigues et de Port de Bouc, les chantiers d’insertion (Figuerolles et Graines de Soleil), la Mission Locale, l’AECD …
 
Réalisations
 
 – la rédaction en commun d’un « Diagnostic territorial de l’accueil et de l’accompagnement des personnes en situation de migration sur le territoire du Pays de Martigues » ;
 – l’examen en commun de plusieurs cas individuels ;
 – la préparation d’un guide en plusieurs langues à destination de ces populations.
 
Rôles et missions de chacun
C’est à l’occasion d’une des toute premières réunions qu’une des responsables institutionnelles a reconnu que malgré les dispositifs officiels, les associations de bénévoles étaient nécessaires, non seulement pour pallier d’éventuelles « carences » des institutions mais aussi parce que les bénévoles interviennent et agissent aux limites de ces dispositifs institutionnels. 
En effet, nous intervenons aux deux extrémités du parcours d’un demandeur d’asile ou d’un étranger en voie d’intégration : avant qu’un mineur ne soit pris en charge par l’ASE, et lorsqu’un demandeur d’asile ou de carte de séjour vient d’essuyer un refus. Le rôle des institutions ne s’inscrit qu’entre ces deux évènements, mais pourtant les personnes en cause ont encore des droits à faire valoir à condition qu’on puisse les accompagner et leur permettre de faire le nécessaire.
C’est donc à ce moment là que les associations peuvent intervenir pour permettre à toutes ces personnes de poursuivre leurs démarches.
 
C’est un lieu où des échanges de bons procédés peuvent se dire, des situations nouvelles peuvent s’analyser, et où on peut s’informer des procédures administratives qui évoluent.  Bref, c’est dans cet esprit que ce groupe de travail continue de se réunir tous les trimestres depuis déjà plus de deux ans. 
 
 
Les objectifs, les actions, les permanences hebdomadaires de l’association, la demande et la volonté de coopération des professionnels, sont autant de signes qui donnent sens et font nécessité pour l’association « Maison de l’hospitalité » comme pour toutes les associations et organisations impliquées à faire le point sur ce qu’elles doivent mettre en place pour rendre leur fonctionnement plus efficace et plus professionnel, tout en gardant leur esprit et leur caractère de bénévolat solidaire. C’est à ce prix que pourra continuer cette collaboration entre bénévoles et professionnels. 
 
Cette expérience montre que là où chacun fait preuve d’ouverture et de bonne volonté, on peut créer des instances de régulation et de coopération qui rendent les institutions plus « humaines » et les bénévoles plus efficaces.
 
Georges Fournier, 
Président de l’association Maison de l’Hospitalité